concours et payés au moyen d’une taxe analogue à nos centimes additionnels aux contributions directes, on peut dire qu’en France, sauf dans un petit nombre de départemens, les populations agricoles ne jouissent pas du bienfait de l’assistance médicale. N’est-ce pas un état de choses indigne d’un grand peuple et d’un pays qui est encore riche malgré ses désastres ?
Il ne faudrait pas cependant être trop sévères pour nous-mêmes. A diverses époques, de généreux efforts ont été tentés pour doter nos campagnes d’un système de ce genre. Malheureusement la versatilité de l’opinion publique, les troubles apportés par les révolutions dans le travail de nos assemblées, par-dessus tout ce manque de persévérance qui compromet presque toujours chez nous les tentatives que l’initiative individuelle a suscitées et que la loi ne vient pas soutenir, ont empêché ces efforts d’aboutir à une organisation générale et durable. Dès 1810, les deux départemens du Haut-Rhin et du Bas-Rhin avaient su organiser pour les indigens des campagnes un service médical satisfaisant ; leur exemple fut imité par la Moselle en 1823, par la Haute-Saône en 1843, par la Meurthe en 1849, par le Loiret en 1850. Bientôt, sous l’impulsion du ministère de l’intérieur, la plupart des départemens entrèrent dans cette voie. Un moment, on en compta près des deux tiers ; mais cette organisation était fragile, elle ne reposait que sur le bon vouloir des conseils-généraux. Il advint que plusieurs se lassèrent de fournir des subventions, et du même coup la désorganisation se mit dans les services. Au lieu de 51 départemens pourvus d’une assistance médicale en 1868, on n’en trouve plus que 35 en 1869. L’année suivante, le chiffre s’était relevé à 45 ; il est aujourd’hui de 44 d’après la statistique de la médecine gratuite pour l’année 1873. Ainsi le mouvement de l’assistance médicale dans les campagnes, après avoir suivi une progression rapide, s’est arrêté tout à coup. C’est une institution qui ne s’étend pas, et qui n’arrive à se maintenir là où elle existe qu’avec la plus grande difficulté.
L’intervention du législateur est donc indispensable pour raviver et transformer un organisme défectueux ; elle l’est d’autant plus que nos campagnes tendent à se dépeupler de médecins. Il y avait en 1847, en France, 10,643 docteurs ; aujourd’hui on en compte 10,766. Ainsi pendant vingt-cinq ans le nombre des docteurs en médecine est resté à peu près stationnaire ; mais il n’y a pas que les docteurs qui exercent la médecine, il y a aussi les officiers de santé : or le nombre de ceux-ci s’est fortement abaissé. Il est tombé de 7,456 en 1847 à 4,665 en 1872, en sorte que le nombre total des praticiens, qui était en 1847 de 18,099, soit 1 médecin pour 1,895 habitans, n’est plus aujourd’hui que de 15,419, soit 1 par