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nées, mais non vaincu par l’âge, réunit dans un livre les deux objets de ses affections, Florence et l’Italie nouvelle.

L’Espagne, à travers ses révolutions, finira-t-elle par reconquérir la fixité que l’Italie a gardée même dans les crises les plus décisives de sa transformation ? Elle y travaillé avec une certaine énergie et même aujourd’hui avec une certaine suite, dont le principal mérite revient assurément à l’homme chargé de diriger les affaires de la monarchie restaurée. Une épreuve que l’Italie nouvelle n’a pas connue au même degré que l’Espagne, ou qu’elle n’a connue que d’une manière très transitoire, c’est cette guerre civile obstinée, meurtrière, stérile, qui épuise le pays, qui rend plus difficile le rétablissement d’un régime régulier. Les carlistes n’ont certainement aucune chance de triompher ; mais, s’ils n’ont aucune chance de réussir, ils peuvent prolonger la lutte dans les provinces où ils sont retranchés, et aggraver ainsi les misères du pays. Un instant, on a pu croire que l’adhésion de Cabrera au roi Alphonse XII allait produire des effets décisifs. Assurément l’exemple donné par un des chefs les plus anciens et les plus brillans de la cause carliste a eu une certaine influence sur les bandes de don Carlos ; il n’a point atteint néanmoins jusqu’ici le noyau des forces de l’insurrection, et il est clair que c’est toujours à l’action militaire de frapper le grand coup qui peut déterminer la décomposition des forces carlistes. Jusqu’à ce que ce coup puisse être frappé d’une main énergique et sûre, tout est incertain ; les armées restent en présence, les opérations ne se poursuivent que sur certains points, particulièrement sur la côte cantabrique, où l’amiral Barcaiztegui vient d’être tué par un obus carliste, et les changemens fréquens de généraux ne sont pas de nature à activer la guerre.

Comment sortir de là ? À vrai dire ce n’est pas une question exclusivement militaire, ce n’est pas seulement la lutte d’une armée contre une année. L’action militaire dépend de la politique, et c’est ici justement que ce qui se passe aujourd’hui à Madrid prend une certaine importance. Jusqu’ici la marche du gouvernement nouveau a été paralysée par le conflit souvent invisible de toutes les influences, par les efforts de la fraction absolutiste de l’ancien parti modéré, qui n’a rien négligé pour s’imposer à la faveur de ses vieux services et de son attachement à la cause royale. Évidemment M. Canovas del Castillo, après avoir eu plus d’une lutte intime à soutenir et plus d’une résistance à vaincre, a senti lui-même que le moment était venu d’en finir avec tous ces conflits d’influence et de donner à la jeune royauté d’Alphonse XII le caractère constitutionnel qu’elle doit avoir, il a compris qu’il devait agir pour rallier toutes les forces libérales à la monarchie nouvelle, et avec une habile hardiesse il a fait un pas décisif vers le rétablissement du régime parlementaire. Deux actes ou deux incidens significatifs ont marqué jusqu’ici cette évolution qui vient de