Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 9.djvu/842

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LE
MAJOR FRANS[1]

I.
LÉOPOLD DE ZONSHOVEN À M. WILLEM VERHEYST, AVOCAT À A…
La Haye, mars 186..

Cher ami, accourez chez moi par le premier express que vous pourrez prendre. II m’arrive des choses miraculeuses, et j’ai besoin de m’épancher dans le sein d’un ami, ou bien je vais étouffer. Figurez-vous Léopold de Zonshoven, destiné dès son enfance à jouer dans ce bas monde le triste rôle du gentilhomme pauvre, votre ami Léopold, tout d’un coup héritier d’une fortune colossale !

C’est une vieille tante de ma mère, dont je n’avais jamais entendu parler et qui paraît avoir été brouillée avec toute la famille, c’est elle qui a voulu faire avec moi « la fée charmante » en me laissant par testament toutes ses propriétés. À moi ! à moi qui ai toujours eu tant de peine à ne pas faire de dettes, qui n’ai pu me permettre ni folie, ni caprice, et qui me vois d’un moment à l’autre à la tête d’un million de florins[2] ! Je faillis, en ouvrant la lettre qui m’annonçait cette incroyable nouvelle, renverser ma lampe ; heureusement elle fut maintenue par mon hôtesse, qui attendait les 80 cents réclamés

  1. Nous offrons ici sous une forme réduite la dernière œuvre de Mme Bosboom-Toussaint, auteur hollandais d’un mérite fort apprécié dans son pays. Femme du peintre éminent M. Bosboom, dont on estime surtout les intérieurs d’église, Mme Bosboom-Toussaint s’est fait remarquer dans ces dernières années par ses romans historiques, dont le plus réputé a pour titre de Wonderdoktor (le Médecin-Miracle. Le Major Frans est au contraire un roman de caractère et de mœurs contemporaines, dont l’intérêt s’accroît pour nous d’une foule de détails fortement marqués au coin de la vie néerlandaise.
  2. Environ 2,116,000 francs.