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élèves les théories politiques grundtvigiennes : le scandinavisme règne en maître ; on prêche la réconciliation avec les Suédois et les Norvégiens, l’union des « royaumes-frères. » Puis on enseigne les élémens du droit administratif et constitutionnel pour faire connaître le mécanisme des institutions nationales, et mettre les élèves en état d’exercer avec discernement leurs droits politiques. Par les lectures et les conversations, on les initie aux affaires publiques contemporaines, et on les nourrit de ce libéralisme passionné de Grundtvig qui trop souvent conduit à la démagogie. L’influence des maîtres est d’autant plus considérable qu’il n’y a ni examen ni épreuve d’aucune sorte qui puisse tracer une ligne de démarcation tranchée entre ceux qui font les cours et ceux qui les écoutent.

Cet enseignement patriotique et poétique à la fois est le but principal des hautes écoles. On y sacrifie tout le reste, même les études religieuses, qui souvent ne font pas l’objet de leçons spéciales. Les élèves connaissent déjà les principes fondamentaux de la doctrine ; on s’efforce surtout d’affermir en eux la foi en leur faisant remarquer dans l’histoire l’enchaînement divin des événemens, en leur montrant le Danemark comme la « nouvelle Palestine » que Dieu a comblée de ses bénédictions jusqu’au jour où il lui réservait le suprême honneur de voir naître. Grundtvig. Les légendes des premiers temps du christianisme, les récits de la conversion des Scandinaves et de l’introduction de la réforme dans le nord, les chants religieux sont plus propres que les discussions dogmatiques à faire aimer la religion et à « éveiller » les jeunes auditeurs. Cependant les paysans danois, pour avoir peut-être l’imagination plus rêveuse que ceux des autres pays, ne dédaignent point l’utile. Pour les attirer, on fait quelques concessions à leurs exigences utilitaires, et quelques heures par semaine sont consacrées à l’arithmétique, à la comptabilité, à l’économie rurale, à la chimie agricole, voire à l’écriture, parfois un peu oubliée depuis l’école primaire. D’ailleurs, s’il y a identité dans les principes, les détails de l’enseignement varient suivant le caprice des directeurs ou les nécessités locales. A Lyngby, près de Copenhague, M. La Cour, ancien officier danois, qui s’est dévoué avec une admirable ardeur à l’instruction des paysans, a ajouté une école d’agriculture à la folkhöjskole. A Blaagaard, dans un faubourg de Copenhague, on utilise le voisinage de la ville pour faire visiter les musées et les collections scientifiques, et même pour mener les élèves aux séances du Rigsdag qui présentent un grand intérêt patriotique. A Hindholm, on a fait mieux : une école normale ou séminaire pour les instituteurs ruraux a été créée par le directeur M. Nielsen, un des hommes les plus éminens du parti. Ajoutons à cela que depuis quelques années un bon nombre d’écoles reçoivent des jeunes filles pendant deux ou trois mois de l’été.