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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 13.djvu/62

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Angleterre, et entre autres, me dit-on, l’héritier de la maison d’Orange, qui m’a écrit pour s’annoncer à moi comme mon futur beau-fils, » et plus loin : « ma fille, pour la première fois, paraîtra en public dans la splendeur qui convient à l’approche des noces de l’héritière présomptive de cet empire. » Lorsque la princesse de Galles écrivait cette lettre au prince-régent, il était question en effet d’un mariage pour la princesse Charlotte. Dès le mois d’octobre 1813, la reine d’Angleterre, femme de George III, songeant à marier sa petite-fille, avait jeté les yeux sur le prince héréditaire des Pays-Bas, celui qui a régné plus tard sous le nom de Guillaume II. Le prince-régent ne faisait aucune objection à ce projet. Ayant soustrait la jeune princesse à la direction de sa mère, il avait assumé une responsabilisé morale dont il lui tardait de se dégager. Il était clair d’ailleurs que le mariage de la princesse Charlotte ferait disparaître, non en droit, mais en fait, le dernier lien qui existait encore entre le prince-régent et une épouse détestée. Tant que la princesse n’était point mariée, la mère pouvait renouveler ses plaintes, réclamer ses droits, et, avec le caractère qu’on lui connaissait, qui l’eût empêchée d’agiter encore le parlement ? La jeune fille une fois mariée, plus de discussion possible entre le père et la mère ; la princesse Caroline restait complètement isolée de la cour. C’est à peine si l’on se souviendrait qu’il y avait une princesse de Galles épouse du prince-régent d’Angleterre. Ainsi la reine, par sollicitude pour sa petite-fille, le régent, dans une vue tout égoïste à laquelle se mêlait une inspiration de haine contre la princesse de Galles, désiraient également cette union.

La princesse Charlotte ne se décida point aussi vite : elle voulait prendre son temps, s’informer, réfléchir. Ce n’était pas une personne banale, une de celles dont on dispose aisément au nom des convenances publiques et de la raison d’état. L’étrange éducation qu’elle avait reçue l’avait préservée au moins de l’insignifiance. Elle était très vive, très originale, toute de premier mouvement. Le prince d’Orange, soit ; encore fallait-il qu’elle eût occasion de le voir et de l’apprécier. Or devait-elle l’autoriser à venir sans être mieux instruite de ce qui le concernait ? Consentir à une entrevue, c’était presqu’un engagement. D’ailleurs elle n’avait pas encore dix-huit ans, rien ne l’obligeait à se presser. Elle avait ainsi maintes objections très sages, maintes raisons d’attendre. Cependant la reine y mit une telle insistance que la princesse finit par céder ; elle consentit au voyage du prince d’Orange.

Le 11 décembre 1813, le prince arrive à Londres, et le même jour il est présenté à la princesse Charlotte par le régent. L’impression qu’il fit n’eut rien de défavorable. Le lendemain, la princesse racontait à miss Cornelia Knight, sa gouvernante, certains détails