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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 15.djvu/163

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du pavillon de l’empire est devenu très considérable. « L’accroissement de la puissance de l’empire, ajoutait non sans malice le chancelier de Prusse, lui a rallié tous les nationaux épars dans le monde. C’est, ajoutait-il, ce qui nécessite une augmentation du nombre des bâtimens que le gouvernement envoie en station dans les mers lointaines. » Quant à la protection des côtes, il faut considérer que leur développement est de 1,250 kilomètres, mais que l’assaillant rencontrant des obstacles naturels, tels que le peu de profondeur de l’eau près des rivages, les courans violens, sans parler de la difficulté d’établir solidement à terre les troupes débarquées, il suffirait de couvrir par des batteries flottantes et des forts les localités particulièrement exposées aux attaques : les grandes villes, l’entrée des fleuves, l’Elbe, le Weser, l’Oder, la Vistule, et d’y ajouter des torpilles fixes et des bateaux-torpilles. Passant à l’hypothèse de l’offensive que les « devoirs » du gouvernement pouvaient l’obliger à prendre, le chancelier en précisait la nature : faire des sorties, conserver la route libre au cabotage, opposer des obstacles très puissans au blocus des ports, et surtout transporter, partout où besoin serait, des troupes de terre, « qui sont la vraie force du pays. » C’est ainsi que, sans livrer des batailles rangées contre les forces, probablement supérieures, des grandes puissances maritimes, la marine prussienne, en temps de guerre, pourrait, d’après le rapport, s’employer utilement pour contribuer au résultat final, qui serait l’œuvre des armées de terre.

De toutes ces considérations il ressortait que le plan de 1867 devait être modifié, que la marine devait augmenter toutes ses forces, et qu’il fallait consacrer à cette augmentation beaucoup de millions. Ainsi ce n’était plus 10 bâtimens cuirassés, comme dans le projet de 1867, c’était 14 qu’elle devait réunir ; elle devait pouvoir opposer à une attaque et pour la défense des côtes 7 monitors et 2 batteries cuirassées, sans compter les forteresses maritimes ; elle devait posséder 28 bateaux-torpilles au lieu de 6 qu’on avait prévus en 1867 ; enfin le nombre des corvettes à construire était porté de 14 à 20. Cette flotte devait être achevée en dix années, et se trouver au complet en 1882. Pour obtenir ce résultat, M. de Bismarck demandait un nouveau crédit de 130 millions de francs qui, joint à l’emprunt de 187 millions, votés pour la même cause d’après la proposition faite en 1867, portait à 317 millions, déduction faite d’un reliquat du premier crédit, la somme à dépenser pour la réorganisation de la marine prussienne. Le Reichstag donna au projet du chancelier de l’empire la sanction la plus dévouée, et le nouveau crédit fut réparti en dix années, de telle sorte que la dépense décrût par période de douze mois. M. de Bismarck n’avait pas cherché d’ailleurs à dissimuler qu’il ne