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hectares : c’est en plaine que l’on aperçoit les ouvrages de cette sorte, auxquels les savants modernes attribuent un caractère religieux. Parfois se présentent des pyramides tronquées dont le sommet est une plate-forme sur laquelle il y a des cendres et des ossemens calcinés, des objets divers. On suppose que chacun de ces monticules fut le soubassement d’un temple analogue à ceux de l’Anahuac, seule analogie du reste qui se puisse établir entre les reliques de l’un et de l’autre pays. On n’y retrouve pas de pierres taillées ; peut-être, s’est-on dit, les hommes de ce temps ne savaient-ils bâtir que des édifices en bois. Cependant on serait tenté de croire que les constructions en pierre sont antérieures partout aux constructions. en bois. Il existe encore dans l’Illinois un de ces tertres dont la base a 210 mètres sur 150 de côté, avec une hauteur de 27 mètres au-dessus du sol naturel, en sorte que le volume de terre remuée que cela suppose n’est pas inférieur à 750,000 mètres cubes[1]. Souvent le monticule est conique, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de plate-forme au sommet. Enfin quantité de tertres ont peu de hauteur, mais une grande surface, avec des contours qui rappellent les images les plus diverses. Ici, c’est un oiseau les ailes étendues ; là, c’est un alligator, le corps ployé, la queue recourbée, la bouche ouverte comme s’il allait avaler un tertre plus petit, de forme ovale, placé devant lui. Tels sont les singuliers monumens que l’on rencontre par milliers aux États-Unis, dans les contrées les plus fertiles, rapprochés les uns des autres, non sans intention toutefois.. L’Ohio paraît avoir été le centre des peuplades inconnues, les Mound-Builders, qui les érigèrent. Au sud, les pyramides tronquées sont plus abondantes ; au nord, et erf général sur les frontières du territoire occupé, par ces peuplades, les enceintes fortifiées sont plus fréquentes. Les archéologues américains n’ont pas manqué d’y faire des fouilles ; quelquefois même on a coupé un tertre pour une route ou pour un chemin de fer. On en a déterré beaucoup de choses : des ossemens, des silex taillés, des poteries souvent élégantes, des pipes sculptées avec soin. Les seuls métaux découverts sont le cuivre et l’argent, surtout le cuivre, que fournissaient sans doute les mines du Lac-Supérieur. Il est difficile au surplus de discerner si ces restes proviennent des Mound-Builders eux-mêmes ou bien s’ils y ont été déposés à une époque plus récente. Les Indiens ont toujours manifesté une sorte de vénération pour les monticules dont leur territoire est si bien garni. Leur attribuant une origine mystérieuse, ils en ont fait des lieux sacrés et y ont enterré leurs morts.

  1. Plusieurs voyageurs allèguent que ces monticules ont une origine géologique, et par conséquent ne sont pas l’œuvre des hommes. Cette opinion ne paraît pas avoir été soutenue avec succès.