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rivières et les lacs étaient fréquentés par 83 vapeurs. En 1869, on en comptait 623. Le Volga avait la circulation la plus active ; 428 vapeurs étaient répandus sur ce fleuve et sur ses affluens. A l’origine de ces exploitations, le gouvernement s’y était associé par des subventions. Dans un dessein politique facile à concevoir, il avait encouragé, après les événemens de 1856, la formation de compagnies russes de navigation à vapeur. La principale était la compagnie de la Navigation de la Mer-Noire, destinée à créer à la Russie des intérêts commerciaux dans tout le bassin de la Méditerranée. Le centre de ses opérations était à Odessa. Elle desservait la Mer-Noire et la mer d’Azof ; le Levant, en touchant à Constantinople, Beyrouth et Alexandrie, — Marseille, en passant par la Grèce, — Trieste et l’Adriatique, — Londres enfin par Gibraltar et Lisbonne. Cette compagnie ne tarda pas à tomber dans un état de désorganisation complète. Une autre société, celle du Mercure et du Caucase, faisant le service du Volga et de la Caspienne, ne fut pas plus heureuse ; elle recevait également une subvention annuelle. La somme inscrite au budget montait pour ces deux compagnies à 8,125,000 fr. Enûn le gouvernement russe avait créé une Société de la Mer-Blanche qui n’eut pas un meilleur succès. L’industrie privée est plus heureuse ; mais le commandement de ses navires à vapeur ne parait pas être exclusivement réservé, comme dans les trois compagnies précédemment désignées, aux officiers de la flotte impériale. Ces commandemens sont pourtant une très bonne école de navigation, et l’on ne saurait trop conseiller aux divers états d’en propager la distribution aux officiers de marine, surtout si leurs flottes commerciales à vapeur naviguent en haute mer. Une certaine défaveur, une certaine jalousie, s’attachent quelquefois, dit-on, aux officiers qui acceptent cette tâche. Ce serait une injustice de l’opinion et une erreur des gouvernemens. La vie de ces officiers est des plus pénibles ; on leur confie dans des voyages multipliés des intérêts précieux, et, ce qui est plus précieux que tout, l’existence de nombreux passagers. Ils méritent, et au-delà, les avantages que leur font les compagnies, et le service de l’état sera d’autant mieux confié à ces marins qu’ils sont plus accoutumés aux hasards de la mer et à l’exercice du commandement. Comme conclusion, ajoutons que le gouvernement russe ne peut manquer de trouver dans la navigation commerciale de l’empire les élémens d’une armée navale presque exclusivement composée de marins ou du moins de mariniers. En Russie, c’est le moyen de paralyser les mauvais effets du simple recrutement.

Ces notes que nous avons recueillies sur les deux grandes flottes de la Baltique font naître une question inévitable : la marine française est-elle diminuée ou menacée par ces armemens, au point