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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 15.djvu/814

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femme pour l’informer des ordres étranges qu’il a reçus. Sur tous les moindres points, il exécute les ordres ; mais sa femme ne veut pas revenir vivre avec lui. Elle ne sait rien, allègue-t-elle, relativement à ses champions, et refuse de tirer avantage de leur intervention. Quelques nuits après leur première visite, la bande revient, masquée comme la première fois, à la ferme de Vancil.

« — Où est la femme ? dit brusquement l’un d’eux.

« — Elle ne veut pas revenir, soupire le vieillard. J’ai congédié la servante, j’ai envoyé chercher ma femme, j’ai fait tout ce que vous m’aviez commandé, mais je n’ai pas pu parvenir à faire revenir ma femme au logis.

« En dépit de ses supplications et de ses explications, le pauvre vieillard est poussé hors de sa maison, traîné vers un arbre qui en était proche et attaché à une branche, où il est laissé jusqu’à ce que mort s’ensuive. Le lendemain, son cadavre est trouvé par un fermier nommé Stewart Clup.

« Ce Stewart Clup, fermier qui demeurait près du théâtre du meurtre, avait vu la bande d’hommes masqués et en avait reconnu deux ou trois, à travers leur déguisement, comme membres d’une société secrète appelée le Ku-Klux d’Illinois. Clup parla, irrité qu’il était par cet outrage qui s’était passé près de sa porte. Deux membres de la ligue furent arrêtés sur soupçons et portés sur le rôle des petites sessions ; mais, avant que le procès commençât, le seul témoin qui pouvait prêter serment contre eux n’était plus. Comme Clup revenait dans sa carriole du moulin de De Soto, on entendit un petit clic-clic, une balle siffla dans l’air, et Clup roula mort dans l’arrière de son chariot. Le témoin disparu, le procès des deux hommes soupçonnés n’avait plus de base. »


Revenons à nos sauvages, dont, on en conviendra, cette justice des gentlemen du Ku-Klux clan ne nous a pas beaucoup écarté. Ce qui donne un certain fondement à l’opinion soutenue par M. Dixon, c’est qu’il y a en effet certaines ressemblances entre les manières de procéder des Indiens et celles de ces sévères apôtres de la morale conjugale que nous venons de voir à l’œuvre. Par exemple, c’est souvent sous le masque qu’ils accomplissent quelques-uns de leurs hauts faits, pillages des fermes, arrestations de diligences, attaques contre les convois d’émigrans. Les Indiens connaissent aussi les sociétés secrètes ; ils ont leurs Ku-Klux clan, qui se nomment la Ligue de l’Épingle ou la Société des Chevaux légers. Que nous dit-on que ces sauvages sont incapables de civilisation ? Ils en sont incapables, sans aucun doute, par les méthodes qui ont été employées à leur égard, ces méthodes ayant toujours eu pour but non pas de les introduire dans la civilisation, mais de les en