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Page:Revue des Deux Mondes - 1876 - tome 17.djvu/347

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consentement du ministre des travaux publics à un candidat accepté par celui-ci. L’inventeur d’une mine, quand même il n’est pas le propriétaire du sol, en est le fermier de plein droit, si le maître du dessus ne réclame pas la préférence. Il n’y a rien de constant dans le montant de la redevance qui varie pour chaque mine ; mais toutes sont soumises à un droit fixe de 3 yen par hectare, réduit à 1 yen 1/2 pour le fer et la houille. Toutes les redevances ont été d’ailleurs suspendues, à titre d’encouragement à l’industrie. La loi de 1873, pour être mise en vigueur, demanderait un corps d’ingénieurs qui manquera longtemps encore au gouvernement ; la surveillance, ne pouvant être générale et profitable, se réduit à quelques tracasseries qui gênent l’initiative au lieu de l’aider. « Comme conclusion, dit M. Plunkett, je penche à croire que, malgré la présence de gisemens métallifères en beaucoup de points, il est extrêmement douteux qu’il y en ait beaucoup dont l’emplacement, le rendement et les conditions autorisent, quant à présent, à risquer de grands capitaux dans les entreprises métallurgiques. Il y a probablement de bonnes mines, mais je crains qu’elles ne soient plutôt l’exception que la règle, et, tout compte fait, la richesse minérale du Japon me semble avoir été jusqu’ici estimée par le public bien au-delà de la réalité. »

De ces appréciations, qui résument avec autorité l’opinion aujourd’hui établie, il résulte que les ressources métallurgiques du Japon n’existent pas encore industriellement, qu’elles attendent comme ses champs, comme ses landes, l’alluvion des capitaux qui doit les féconder. Le Pactole peut couler ici comme ailleurs, mais il faut l’y amener, et la source est loin. Les mines, dans leur état actuel, ne peuvent donc servir de garantie à un emprunt d’état, à moins que le prêteur ne soit en même temps autorisé à mettre en valeur un gage qui pour l’instant n’en a pas. On est donc ramené à cette nécessité que le gouvernement ne veut envisager à aucun prix : ouvrir le pays aux capitalistes. La situation ne peut se prolonger ainsi pendant très longtemps ; il faut prendre un parti, ou renoncer absolument à un commerce extérieur ruineux pour le pays, rentrer dans l’ancien isolement, rejeter le rôle de peuple civilisé qu’on a voulu jouer, ou accepter franchement la liberté commerciale, la concurrence, la solidarité internationale avec toutes leurs conséquences. On comprend que c’est là une question qui domine toutes les autres et se mêle sans cesse à chacune dans les relations diplomatiques que nous nous réservons d’examiner.


GEORGE BOUSQUET.