l’est pas ou commence de l’être à peine. L’industrie s’est affranchie des liens de l’antique routine ; il en doit être ainsi de l’agriculture : c’est à la science qu’il appartient de la transformer. Mais comment substituer la connaissance et l’application réfléchie des découvertes nouvelles à la tradition inerte et aveugle ? Par l’enseignement. L’industrie a ses grandes écoles où se forment ses chefs, ceux qui la guident et la renouvellent : l’École polytechnique, l’École centrale, le Conservatoire des arts et métiers. L’agriculture a-t-elle un seul établissement comparable à ceux-là ? Une loi récente, la loi du 29 juillet 1876, vient de lui rendre cette faculté supérieure, cet institut agronomique que l’empire lui avait enlevé. Par là du moins, l’enseignement agricole va revenir à une organisation rationnelle ; mais il s’en faudra, même alors, qu’il soit complet, que l’on ait réalisé les prescriptions du législateur de 1848. Les cadres qu’il avait tracés étaient-ils, par certains côtés, trop amples ? En tout cas, on n’a point essayé sérieusement de les remplir. Qu’a-t-on voulu, qu’a-t-on fait, depuis tantôt cent ans, pour l’enseignement agricole ? quelle est aujourd’hui sa situation ? quels progrès réclame-t-il pour agir avec efficacité sur notre agriculture ? Le moment est venu où ces questions s’imposent à notre étude : il s’agit là d’un service public désormais nécessaire, car il s’agit de la source première de richesse et de prospérité du pays.
L’action des pouvoirs publics sur l’agriculture est singulièrement puissante et multiple ; ils tiennent, à vrai dire, son sort en leurs mains : telles lois, telle agriculture. Jamais on ne la trouve florissante sous un régime d’entraves et de tyrannie. Le premier bienfait qu’elle réclame du législateur est une organisation juste et raisonnable de la propriété foncière : l’affranchissement des servitudes féodales, la libre acquisition de la terre, considérée non comme le monopole de quelques privilégiés, mais comme un bien accessible à tous, que l’on puisse aliéner, diviser, transmettre à son gré. C’est là une liberté capitale, mais insuffisante, si la liberté du travail ne s’y joint. La révolution a garanti à nos campagnes ce double bienfait ; mais après cela, combien de mesures sont indispensables au progrès agricole ! La construction d’un réseau de routes, de voies ferrées, de chemins vicinaux, le percement des canaux, le creusement des ports, l’abaissement des tarifs de douane, qui ouvrent à la production rurale des débouchés nouveaux, un bon système de crédit foncier qui, rapprochant les capitaux du cultivateur, facilite la mise en valeur des exploitations. Et combien de mesures