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Midi arriveront à remplacer la plus grande partie des charbons que l’Angleterre a jusqu’ici exportés en destination des ports de la Méditerranée et de la Mer-Noire, et qu’elles doivent même contribuer à l’approvisionnement de la marine à vapeur dans la mer des Indes et l’Extrême-Orient. Pour développer cette industrie, M. de Ruolz recommande l’établissement à Marseille, ou plutôt à Cette, d’une usine centrale d’agglomération où l’on traiterait les menus charbons des bassins du Gard, de l’Hérault, de la Loire, etc., dont le mélange permettrait d’obtenir un combustible spécialement approprié à l’usage de la marine.


IV

On ne peut reprocher aux Anglais d’avoir entrepris leur grande enquête à la dernière heure, sous le coup d’une calamité, ou talonnés par une crise commerciale : elle a été. une mesure de prévoyance purement théorique. Elle avait pris cinq années, et le volumineux rapport venait d’être imprimé quand la hausse vertigineuse de 1872 s’est déclarée tout à coup. Encore sous l’impression des fantômes de disette qui avaient hanté les esprits, tout le monde a cru d’abord à une terrible pénurie de charbon qui venait sur-le-champ donner un éclatant démenti aux conclusions trop rassurantes de ce rapport. Ces suppositions n’ont pu tenir devant les faits, tels qu’ils ont été constatés par les deux commissions d’enquête du parlement anglais et de l’assemblée nationale, dont les investigations ont fait la lumière sur la nature et sur les causes de la crise houillère de 1872.

Le trait caractéristique de cette crise, c’est que la perturbation n’a atteint que les prix ; la rareté du combustible n’a été qu’un accident local, et tout le monde a pu s’en procurer en consentant à payer les prix exigés par les détenteurs. La hausse a commencé en Angleterre dans l’été de 1871, y est arrivée à son maximum au mois d’octobre 1872, et a duré plus de deux ans ; en Belgique, elle a commencé six mois plus tard, et en France, si nous exceptons les bassins du Nord, cette espèce de mascaret ne s’est fait sentir qu’au bout de neuf mois (au printemps de 1872). La crise a eu, dans ces deux pays, beaucoup moins d’intensité, et nos départemens du Midi et du centre n’en ont ressenti que le contre-coup affaibli par la distance. D’après le rapport de M. Ducarre, sur les marchés du Nord les prix ont monté dans la proportion de 100 à 170[1] ; dans le bassin de Saint-Étienne, la hausse n’a pas dépassé le rapport de 100 à 150, et dans le Gard elle s’est arrêtée à 140. En Belgique,

  1. La tonne de houille, qui en 1869 valait en moyenne, sur le carreau de la mine, 12 fr. 50 c, se vendait 21 fr. en 4873. Depuis 1874, les prix ont beaucoup baissé) cependant ils ne sont pas encore revenus au taux de 1 70.