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l’importance, la nature et l’avenir de ses relations commerciales la désignent pour être notre principal port charbonnier et celui qui en recueillerait le plus d’avantages. « Situé dans une région qui produit peu d’articles d’exportation, dit M. de Ruolz, ce port ne trouve que difficilement des frets de sortie, surtout pour les points rapprochés ; le Languedoc même, qui lui fournissait de grandes quantités de vins pour l’étranger, dirige aujourd’hui vers Bordeaux une partie de ses récoltes. C’est seulement à l’aide de la bouille, et de la houille à bon marché, que Marseille pourra se procurer ce fret de sortie qui lui manque, donner un nouvel essor à ses industries locales, et doubler ou tripler peut-être le nombre de ses bateaux à vapeur. » Si Marseille avait du charbon comme lest partiel, les cotonnades de Rouen et les soieries de Lyon pourraient compléter les chargemens et s’exporter ainsi à bas prix, tout comme les marchandises légères des Anglais. Or en recourant aux diverses mesures que M. de Ruolz expose en détail, il serait possible d’arriver, pour Marseille seulement, à une exportation charbonnière d’un million de tonnes, et pour Cette, qui deviendrait le port auxiliaire, à 300,000 tonnes.

L’exportation par Marseille serait alimentée principalement par le bassin d’Alais (Gard), dont la production a atteint 1,700,000 tonnes. Les seules mines de la Grand’Combe espèrent arriver à une extraction d’un million de tonnes par an, et l’ensemble du bassin pourra aisément dépasser 2 millions de tonnes. Ce chiffre excède de beaucoup la consommation locale, bornée par la concurrence des bassins limitrophes, et il resterait un stock d’au moins 800,000 tonnes disponibles pour l’exportation. La fabrication des agglomérés, qui sont destinés à jouer un grand rôle dans l’exportation, a fait également de rapides progrès dans cette région. Les houilles de la Loire et les lignites des Bouches-du-Rhône pourraient aussi contribuer à l’exportation par Marseille. On sait que les lignites de Fuveau se rapprochent beaucoup de la houille : ce charbon est dur, brûle facilement avec une longue flammé, attaque peu les chaudières, conserve longtemps un feu doux, même sous la cendre, qualité précieuse pour les machines de mer ; il n’encrasse pas les grilles et laisse peu de cendres : ces avantages compensent dans une certaine mesure la faible densité et le pouvoir calorifique inférieur des lignites. On peut d’ailleurs utiliser les lignites pour les mélanges, et surtout par l’agglomération.

Pour le moment, il existe encore un écart assez fort entre le prix des charbons anglais mis à bord à Newcastle et celui des charbons français sous vergues à Marseille, écart qui est en faveur du combustible anglais ; mais la hausse des dernières années l’a déjà diminué, et l’on pourrait le réduire davantage par divers moyens que M. de Ruolz examine en détail. Il n’y a probablement pas lieu