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y être préparés. Au reste, si toutes les assurances, et celles que j’ai reçues sont les plus fortes, ne sont pas de vrais mensonges, je n’ai rien de fâcheux à redouter. L’article bref, mais très amical, du Times, me prouve que j’ai encore quelque ascendant sur l’esprit revêche de ma vieille connaissance, M. Varnes. »


Quelques jours plus tard.

« Le bill de régence sera lu lundi prochain pour la seconde fois à la chambre des lords. Jusqu’à présent il n’y a aucune opposition, sauf de la part du duc de Sussex. Celui-ci s’est comporté comme toujours, de la façon la plus absurde. « Lui et toute la famille de Hanovre sont offensés au plus haut point, a-t-il dit, par la présentation de ce bill. Il s’agit à ses yeux, non des personnes, mais du principe même, c’est pour cela qu’il est obligé de protester. Il sait bien que cette protestation lui nuira, mais il a son devoir à remplir. » Tout cela fait beaucoup de peine à notre bonhomme de premier ministre ; il a déjà envoyé cinq ou six négociateurs au duc pour tâcher de le calmer, mais sans succès jusqu’à présent. Je ne sais si cette opposition du duc trouvera de l’écho dans la chambre des communes, mais, y eût-il de sottes paroles, le sort du bill, grâce aux promesses de Peel, est parfaitement assuré. »


Le bill fut voté en effet et par la chambre des lords et par la chambre des communes. Le fiasco du duc de Sussex était aussi complet que possible, car lui seul avait fait de l’opposition, lui seul avait agi et parlé, — lui seul, tout en affirmant qu’il s’agissait, non des personnes, mais du principe, avait exposé sa personne aux désagrémens de ce ridicule échec. N’était-il pas évident qu’il ne soutenait que ses propres prétentions ? Les mêmes raisons de droit qui avaient empêché le duc de Cumberland, frère puîné du duc de Kent, de succéder à Guillaume IV, et qui l’avaient placé bon gré mal gré sur le trône de Hanovre, devaient l’empêcher aussi d’être nommé régent d’Angleterre, ou même d’occuper un siège dans un conseil de régence. Assurément, si la reine Victoria était morte sans enfans, le duc de Cumberland, roi de Hanovre, aurait retrouvé ses droits à la couronne de la Grande-Bretagne, mais tant qu’il y aurait eu des héritiers mineurs dans la ligne du duc de Kent, le roi de Hanovre n’aurait pu prendre aucune part au gouvernement britannique, ni comme régent, ni comme conseiller de la régence ; chef d’un état distinct, il n’y avait pour lui, dans la constitution anglaise, aucune place politique possible. C’était donc le duc de Sussex, comme venant immédiatement après lui, qui pouvait seul concevoir une ambition de cette nature. Seulement, grâce au bon sens de l’opposition, à la sagesse de l’opinion publique, à la sympathie