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Thurot, Brunet de Presle, de Witte, Th.-Henri Martin, doyen de la faculté des lettres de Rennes, Ferdinand de Launay, Waddington, Heuzey, Petit de Julleville, Rayet, ont publié, soit en volumes, soit dans le Journal des Savans et autres recueils, une série de recherches du plus grand intérêt. M. Martin a étudié la cosmographie populaire après l’époque d’Homère et d’Hésiode; M. Petit de Julleville, l’histoire de la Grèce sous la domination romaine; MM. Miller et Brunet de Presle, les papyrus du Louvre et de la Bibliothèque nationale; M. Lallier, la condition de la femme dans la famille; M. Ferdinand de Launay, les moines et les sibylles dans l’antiquité judéo-grecque; M. Waddington a poussé jusqu’à la 83e livraison le Voyage archéologique en Grèce et en Asie-Mineure ; et M. Egger a montré que l’on pouvait tout à la fois se faire applaudir du monde savant et se faire lire du public, en donnant, à côté de dissertations approfondies sur des sujets d’érudition spéciale, l’histoire d’un ménage athénien. L’exploration archéologique des îles grecques de la Méditerranée a produit un très bon travail de M. Rayet sur l’île de Kos ; elle se poursuit activement, et nous pouvons dire que ses résultats resteront définitivement acquis, car les élèves de l’École d’Athènes, auxquels elle est généralement confiée, y apportent une sûreté de critique qui les met à l’abri de la contradiction; les mésaventures archéologiques de M. Schliemann prouvent que l’on ne peut pas toujours en dire autant des Allemands[1].

Comme trait d’union entre la Grèce et Rome, nous rencontrons la Cité antique de M. Fustel de Coulanges, l’un des bons livres du temps présent, qui embrasse dans une forte synthèse l’histoire des institutions des deux pays, et quand nous arrivons à Rome nous y trouvons encore en première ligne l’université, qui est là chez elle et le fait bien voir. Quoiqu’elle nous touche par nos origines plus directement que la Grèce, et que l’empire l’ait un moment rendue populaire, parce qu’on cherchait, par une illusion de perspective, des analogies entre les césars et Napoléon III, l’antiquité romaine n’a produit qu’un nombre assez restreint de publications en dehors des livres à l’usage des classes; mais elles suffisent à montrer que nous ne sommes pas déshérités. Cicéron et ses amis ont ouvert à

  1. M. Schliemann est sans doute un savant distingué; mais, comme bien d’autres savans de son pays, quand il faut choisir entre l’hypothèse et la réalité, il choisit l’hypothèse. Il vient de trouver dans les fouilles de Mycènes une foule d’objets en or à côté d’un squelette dont les trente-deux deux sont très bien conservées. Sans plus d’examen, sans que la personnalité du mort soit constatée par une inscription, il a informé l’Europe qu’il avait découvert le tombeau d’Agamemnon, et la preuve qu’il en donne c’est que le squelette aux trente-deux dents répond exactement à l’idée qu’il s’était faite depuis longtemps de la personne du roi des rois. Les objets trouvés en même temps représentent plus de 300,000 francs en valeur intrinsèque, et c’est là le côté le plus positif de la découverte de M. Schliemann.