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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 19.djvu/925

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composer une troupe un peu bigarrée et un peu changeante, car les meilleurs ne tardent pas à être rappelés dans leur patrie, mais aussi toujours brillante et active. En d’autres contrées, le vote souverain des professeurs, qui devraient être les plus intéressés à maintenir l’éclat du corps, a fonctionné au profit de la médiocrité et de l’esprit de coterie. Si l’on prend l’avis de ceux qui ont le plus manié les choses de l’enseignement, on voit qu’en général les professeurs préfèrent que les nominations soient faites par l’état, tandis que l’état, quand il a la conscience de ses devoirs, aime mieux laisser la responsabilité aux corporations. Dans la plupart des universités allemandes, qui ont à ce sujet une longue expérience, le pouvoir central reste investi du droit de choisir les professeurs; mais il faut remarquer que dans un pays où l’institution des docteurs libres et des maîtres de conférence est depuis longtemps en vigueur, et où des gouvernemens différens se disputent les hommes en renom, les choix sont à peu près indiqués par l’opinion. Chez nous, un système mixte est sans doute celui qui offrira le moins d’inconvéniens. Une présentation faite par l’université pourrait avoir pour contrôle une autre présentation faite par un conseil inamovible siégeant auprès du ministre : le chef de l’état, sur l’avis du ministre, choisirait en cas de dissentiment. Il est à souhaiter d’ailleurs que le nombre des professeurs titulaires soit assez limité, tandis qu’on augmenterait avec avantage celui des maîtres de conférence, dont la nomination, selon nous, doit au moins dans le présent appartenir à l’état.


Si incomplète que soit cette esquisse, elle suffira pour montrer la nécessité d’une réorganisation. Nous avons parlé surtout au nom de l’intérêt scientifique; mais d’autres intérêts encore commandent à la France de s’appliquer avec énergie et avec persévérance à cette tâche. Depuis trente ans, c’est surtout vers les universités allemandes que se dirige cette partie de la jeunesse du monde entier qui, ses premières études achevées, va chercher au dehors un complément d’instruction. Quand on consulte les statistiques publiées par les universités d’Allemagne, on est surpris de voir à quel point l’élément étranger y est représenté. Or il est certain qu’un enseignement solidement constitué est un moyen d’influence extérieure : qui ne sait l’importance qu’ont pour la vie entière ces années où l’esprit se forme et où se contractent les belles amitiés de la jeunesse? Il suffira que la France, qui a toujours conservé sa force attractive dans le domaine des arts, le veuille sérieusement pour qu’elle la retrouve aussi en d’autres régions de l’intelligence; à peine l’École des hautes études était-elle fondée qu’on y a vu se