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et qui, seconde condition, soit constitué de telle sorte au physique et au moral qu’on puisse espérer son succès dans cette tâche difficile de mari de la reine d’Espagne.

« Les Bourbons, si on les examine d’après cette double exigence, offrent prise à beaucoup d’objections.

« Notre candidat est plus acceptable que bien d’autres au point de vue politique et pour l’Espagne et pour les vrais intérêts de l’Europe, sans compter que la parenté avec le Portugal pourrait dans un cas donné apporter un élément utile aux deux dynasties, et les mettre sur le pied d’amitié que réclame leur salut commun. « C’est une autre question de savoir si Léopold possède les qualités personnelles nécessaires pour une entreprise si difficile ; il est jeune, inexpérimenté, et vit dans un milieu où il lui sera bien malaisé d’acquérir en si peu de temps ce qu’une pareille mission exige pour la maturité de l’esprit et surtout pour le caractère.

« En de telles circonstances, c’est faire assez, c’est même tout faire que de permettre au destin de le trouver, si le destin, dans sa capricieuse envie de réaliser des choses invraisemblables, persistait à le chercher en dépit de tous les empêchemens et de tous les obstacles.

« C’est ce qui a eu lieu, autant du moins que la chose était en notre pouvoir.

« Nous avons dirigé sur ce candidat l’attention de l’Espagne et de l’Angleterre avec la prudence que conseillait un examen attentif de toutes les convenances. Espartero ne s’est déclaré ni pour ni contre ; il a dit très sagement qu’une telle affaire ne pouvait être décidée que par le gouvernement espagnol en vue des véritables intérêts de la nation espagnole, sous le patronage et avec l’assentiment de l’Angleterre. Nous avons déjà obtenu que notre ministère (le ministère Peel), d’abord favorable à un Bourbon parce qu’un Bourbon susciterait le moins de difficultés extérieures, est devenu tout à fait impartial, et soutiendra loyalement tout choix conforme aux vrais intérêts de l’Espagne, c’est-à-dire par là même assuré du succès.

« Ainsi la semence est déjà confiée à la terre, à une terre, il est vrai, où, selon toute vraisemblance, elle ne lèvera point ; qu’importe ? notre part du travail est accomplie, la seule part qui fût possible, la seule que conseillât la raison ; nous n’avons plus qu’à attendre le résultat. »


Voilà un aveu des plus graves et qui vient compléter fort à point les Mémoires de M. Guizot. « Je ne saurais dire, écrit M. Guizot, à qui vint d’abord l’idée de la candidature du prince de Cobourg et par qui elle fut répandue. » Par qui elle fut répandue, Stockmar nous le dit sans détour ; ce fut par lui et par le prince Albert. Notre candidat, c’est le candidat des Cobourg, le candidat du prince Albert et du baron, le jeune prince Léopold. Et Voyez avec quel soin ils lui