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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/593

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d’Ecosse a réuni 260,000 francs et a fondé une station du nom de Livingstonia, sur les bords du lac Nyassa, d’où sort l’un des affluens du Zambèse ; le personnel comprend un lieutenant de marine comme commandant, un charpentier, un mécanicien, un tisserand et trois ouvriers agricoles, outre les deux missionnaires. La station de Mombasa, sur la côte de Zanzibar, est établie sur le même modèle, et l’expédition que la Société anglaise des missions a dirigée sur l’Uganda, pour y installer un poste entre les lacs Victoria et Albert, n’est pas composée autrement.

Bien entendu, les stations créées par la conférence internationale ne pourraient s’occuper de propagande religieuse, puisqu’elles seraient entretenues par les souscriptions de personnes appartenant à différens cultes. Tout en se montrant très sympathiques aux efforts faits à côté d’elles pour répandre l’Évangile, elles devraient conserver un caractère exclusivement laïque. Leur but principal est de servir de bases d’opération aux voyageurs qui s’avanceront dans l’intérieur pour pénétrer dans des régions encore inexplorées. Aujourd’hui l’explorateur, en partant de la côte, doit emporter avec lui des provisions, des instrumens et surtout des moyens d’échange pour des mois ou des années. Il doit ainsi emmener et entretenir une interminable file de porteurs qui absorbe le plus clair des ressources et dont les fréquentes désertions entravent sans cesse la marche en avant. Ce serait un avantage incalculable, si à l’intérieur même du pays le voyageur trouvait ce qui lui est nécessaire, et si son point de départ, au lieu d’être situé sur la côte, à Bagamoyo ou à Saint-Paul-de-Loanda, l’était à la lisière même des régions inconnues où il faut s’avancer, à Nyangwé ou à Ujiji par exemple. Ces stations seraient comme des entrepôts où il pourrait s’approvisionner de tout ce dont il a besoin, et un lieu de refuge pour s’y rabattre en cas de maladie ou d’échec. Les privations, les souffrances de toute nature qui ont assailli les Livingstone, les Nachtigal, les Grant, les Cameron, et qui les ont empêchés de poursuivre leurs découvertes, seraient en grande partie épargnées à ceux qui désormais marcheraient sur leurs traces. Les chefs de ces postes, grâce à leur instruction scientifique, apprendraient vite à connaître les ressources du pays. Ils pourraient servir de guides aux explorateurs, faire connaître à l’Europe les denrées à exporter et ouvrir ainsi au commerce des routes nouvelles. Les travaux exécutés par les ouvriers européens, sous les yeux des indigènes, initieraient ceux-ci aux arts et aux besoins de la civilisation, qui se répandraient rapidement de proche en proche. La mission catholique de Gondokoro s’est maintenue au cœur même de l’Afrique équatoriale et ne s’est déplacée que pour échapper à la mortalité effrayante causée par les fièvres. C’est la preuve que des stations de ce genre,