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LA NOUVELLE SÉRIE
DE LA
LÉGENDE DES SIÈCLES
DE M. VICTOR HUGO[1]

« Avec le monde a commencé une guerre qui doit finir avec le monde et pas avant : celle de l’homme contre la nature, de l’esprit contre la matière, de la liberté contre la fatalité… Dure à jamais le combat ! il constitue la dignité de l’homme et l’harmonie même du monde. » C’est ainsi que Michelet, il y a près d’un demi-siècle, ouvrait son Introduction à l’histoire universelle. Edgar Quinet, vers le même temps, résumait avec la même foi la même philosophie de l’histoire quand il disait si poétiquement : « Captif dans les bornes du fini, l’infini s’agite pour en sortir, et l’humanité qui l’a recueilli, saisie comme d’un vertige, s’en va, en présence de l’univers muet, cheminant de ruines en ruines sans trouver où s’arrêter. C’est un voyageur pressé, plein d’ennui loin de ses foyers. Parti de l’Inde avant le jour, à peine s’est-il reposé dans l’enceinte de Babylone qu’il brise Babylone, et, restant sans abri, il s’enfuit chez les Perses, chez les Mèdes, dans la terre d’Égypte. Un siècle, une heure, et il brise Palmyre, Ecbatane et Memphis, et, toujours renversant l’enceinte qui l’a recueilli, il quitte les Lydiens pour les Hellènes, les Hellènes pour les Étrusques, les Étrusques pour les Romains, les Romains pour les Gètes, les Gètes… Mais que sais-je ce qui va suivre ? Quelle aveugle précipitation ! Qui le presse ? Com-

  1. 2 volumes ; Calmann Lévy, 1877.