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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 20.djvu/964

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8 mètres, ne laissent voir que du sable. Le percement du seuil de l’Oued-Melah n’offrira donc aucune difficulté sérieuse. Pour creuser la tranchée initiale, on aura environ 20 millions de mètres cubes à déplacer directement; les déblais du canal définitif seront, il est vrai, de 110 millions de mètres cubes, mais l’on peut compter sur les eaux de la Méditerranée pour achever l’affouillement de la tranchée. En ajoutant les terrassemens que demandera l’établissement des tranchées entre les chotts, on arrive à un total de 25 ou 30 millions de mètres cubes de sable à déplacer directement, et à une dépense probable de 25 à 30 millions de francs. Tel est le devis approximatif qu’on peut présenter dès aujourd’hui. Le remplissage complet de la mer intérieure demanderait environ neuf ans; mais dès la quatrième année les différens bassins seraient recouverts d’immenses nappes d’eau accessibles aux petits bateaux, et dont l’heureuse influence sur le climat de l’Algérie se ferait déjà sentir.

Nous n’insisterons pas sur les conséquences que doit avoir la submersion des chotts; M. Roudaire les a longuement développées ici-même, « En mettant en regard les dépenses à faire pour mener cette entreprise à bonne fin et les avantages immenses qui en découleraient, dit-il en terminant son rapport, il est permis de considérer dès aujourd’hui la création de la mer d’Algérie comme un projet dont la réalisation est certaine. Amélioration profonde du climat de l’Algérie et de la Tunisie, et par conséquent accroissement considérable de la richesse agricole de ces contrées, où la sécheresse est un obstacle à la fertilité naturelle du sol, — sécurité complète du sud au nord de notre colonie, voies de communication faciles et économiques, développement du commerce et de l’industrie, nouvelle direction imprimée au commerce du centre de l’Afrique, telles seraient en quelques mots les heureuses conséquences de l’exécution de ce projet. » On peut ajouter que les dépenses seront couvertes par les droits de passage, de navigation, de pêche, par la concession d’une partie des terres, absolument incultes aujourd’hui, qui sont situées autour de la mer future; mais ces bénéfices directs, immédiats, seront encore peu de chose à côté des résultats généraux, tels que l’amélioration du climat de ces contrées et l’accroissement de la fortune publique et du bien-être des habitans. Il est parfaitement juste de dire que la réalisation de ce projet serait le couronnement de la conquête de l’Algérie.


R. R.


Le directeur-gérant, C. BULOZ.