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ses dépendances, dont les limites du côté de la province persane de Khorassan étaient trop notoires pour avoir besoin d’être spécifiées.

En réponse, le prince Gortchakof commença par communiquer au gouvernement anglais un rapport du général Kaufmann et un mémorandum rédigé par M. Struve, dans lequel on contestait que le Badakshan et l’Ouakhan fassent soumis à l’autorité de l’émir de Caboul; mais le gouvernement russe avait intérêt à accepter les propositions anglaises, qui lui abandonnaient les points les plus intéressans pour la Russie, la région occupée par les Turcomans Tekkès et l’oasis de Merv. Aussi, dans une nouvelle note, le prince Gortchakof déclara-t-il retirer toute objection relativement au Badakshan et à l’Ouakhan, « pour faire plaisir au cabinet anglais. » Il ajoutait: « Nous sommes d’autant mieux disposés à donner au gouvernement anglais cette marque de courtoisie, que ce gouvernement s’engage à user de toute son influence sur Shir-Ali-Khan pour l’amener à garder une attitude pacifique, comme aussi pour lui faire abandonner toute mesure d’agression et tout projet de conquête nouvelle. Il est indispensable que cette influence s’exerce. Elle repose non-seulement sur l’ascendant matériel et moral de l’Angleterre, mais sur les subsides que Shir-Ali reçoit d’elle. En cet état des choses, nous voyons dans l’assurance que nous donne l’Angleterre une garantie effective du maintien de la paix. » Les choses paraissaient ainsi réglées; mais, lorsque cette correspondance fut communiquée au parlement et publiée, on demanda quelle était l’étendue de l’engagement dont parlait la note du prince Gortchakof, et si l’Angleterre était tenue à une intervention armée pour contraindre l’émir à demeurer en paix avec ses voisins. M. Gladstone déclara à la chambre des communes, le 23 avril 1873, que l’Angleterre n’avait assumé aucune responsabilité et que l’exercice de son influence devait se limiter à l’emploi des conseils et des avis amicaux. Le gouvernement russe envisagea cette déclaration comme un abandon formel de l’arrangement projeté, la Russie ne pouvant garantir l’inviolabilité du territoire afghan si l’Angleterre ne s’engageait de son côté à contraindre les Afghans à respecter les territoires situés au-delà de l’Oxus, territoires appartenant aux Vassaux de la Russie, mais que celle-ci considérait déjà comme siens. Le journal officiel de Saint-Pétersbourg fit au sujet du discours de M. Gladstone la déclaration suivante : « Si l’Angleterre a conservé sa liberté d’action, la Russie a aussi conservé la sienne ; en conséquence, les deux gouvernemens n’ont point réellement contracté l’un vis-à-vis de l’autre d’obligations gênantes qui puissent avoir pour effet de les placer dans une fausse position. En réalité, les choses demeurent donc exactement au point où elles en étaient avant les négociations de 1869 et de 1872, sauf qu’on s’est mis d’accord relativement aux