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possessions des deux empires d’une zone intermédiaire dont la neutralité serait reconnue et garantie par l’Angleterre et la Russie. Le prince Gortchakof accueillit favorablement cette ouverture et proposa comme zone neutre l’Afghanistan. Cela ne faisait point le compte de l’Angleterre, qui protégeait et pensionnait l’émir de Caboul, et qui l’avait rétabli sur le trône d’où il avait été renversé, afin d’avoir la haute main dans l’Afghanistan. À la suite d’une entrevue que lord Clarendon eut à Heidelberg avec le prince Gortchakof, le cabinet anglais décida l’envoi à Saint-Pétersbourg de M. Douglas Forsyth, qui était fort au courant des affaires de l’Asie centrale et des vues des autorités anglo-indiennes. Le gouvernement de Calcutta proposait de garantir, non pas l’indépendance complète, mais l’existence et l’autonomie d’une ceinture de petits états indigènes autour des deux empires, Khélat, l’Afghanistan et Kashgar devant demeurer sous l’influence de l’Angleterre, Boukhara et Khokand sous celle de la Russie. Ce projet fut écarté, mais l’on tomba d’accord que la Russie s’interdirait toute ingérence dans les affaires de l’Afghanistan, et que l’Angleterre prendrait le même engagement au sujet de la région située au nord de l’Afghanistan et abandonnée à l’action exclusive de la Russie. Il fut convenu encore que l’on entendrait par Afghanistan tous les territoires qui avaient reconnu l’autorité ou la suzeraineté de Dost-Mohammed. Il s’agissait d’en déterminer les limites exactes, et de part et d’autre on demanda des renseignemens en Asie. La négociation traîna pendant deux années, malgré les efforts du gouvernement anglais pour arriver à une solution. Enfin le 17 octobre 1872 lord Granville adressa à lord Loftus, pour être communiquée au gouvernement russe, une dépêche portant que le gouvernement anglais, n’ayant reçu aucun renseignement de la part du gouvernement russe, avait dû prendre un parti d’après les meilleurs renseignemens qu’il avait pu se procurer, et s’était arrêté à considérer comme appartenant à l’émir de Caboul : 1o  le Badakshan avec sa dépendance, le district d’Ouakhan, le lac Sirikul à l’est et la rivière Koktcha jusqu’à sa jonction avec l’Oxus, devant former la frontière nord de cette province afghane dans toute son étendue ; 2o  le Turkestan afghan, comprenant les districts de Kondouz, Khulm et Balkh, et ayant pour frontière au nord la ligne de l’Oxus, depuis le confluent de ce fleuve et de la rivière Koktcha jusqu’au poste de Khoja-Saleh inclusivement, sur la route de Balkh à Boukhara : l’émir afghan ne pourrait rien revendiquer sur la rive gauche de l’Oxus au-dessous de Khoja-Saleh ; 3o  les districts intérieurs d’Aksha, Seripoul, Maimené, Shibberjan et Andkhoï, ce dernier devant former l’extrême frontière de l’Afghanistan au nord-ouest, et le désert qui s’étend au-delà appartenant à des tribus turcomanes indépendantes ; 4o  l’Afghanistan occidental avec Hérat et