Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 21.djvu/478

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un loustic de la gauche s’écrie : « Amen ! » Que M. Jules Simon se plaise à montrer que l’église a aujourd’hui plus de libertés qu’elle n’en eut jamais, même sous la restauration, un habile du radicalisme murmure avec un soupir de regret : « Hélas! » Que le chef du cabinet représente le gouvernement comme disposé à maintenir les droits de l’état en refusant de reconnaître une bulle pontificale qui a institué récemment un chancelier de l’université catholique de Lille, M. Gambetta lui-même ajoute aussitôt : « Il faut fermer cette université! » Rien de plus expéditif, il faut fermer : voilà qui a du succès auprès de la gauche! M. le président du conseil, quant à lui, a moins de succès quand il remplit le devoir ingrat de dire à ces libéraux : « Non, il ne faut pas fermer cette université... Il suffit de constater qu’il est impossible que des grades soient conférés en France autrement qu’en observant les règles établies par nos lois. » Et ces républicains ne s’aperçoivent pas que par cette pensée de guerre incessante, mal dissimulée, souvent puérile, ils donnent à leurs adversaires le facile prétexte de dire que ce qu’on poursuit en eux ce n’est pas ce qu’on appelle le cléricalisme, c’est le catholicisme lui-même, c’est la religion de la majorité du pays. Ils ne voient pas qu’en se laissant emporter à des ordres du jour qui dépassent le but, ils s’exposent à faire une œuvre violente ou stérile, dénuée de sanction; ils affaiblissent deux fois le gouvernement en se substituant à lui, en le réduisant à une sorte d’acceptation forcée de ce qu’il ne peut approuver, et en mettant dans ses mains une arme dont il ne peut se servir. Que veut-on qu’il fasse de tous ces gros mots de « sécurité intérieure et extérieure » compromise, de répression d’une « agitation antipatriotique? » Quels moyens peut-il sérieusement employer? Si l’on prenait à la rigueur cet ordre du jour, il ne resterait plus en vérité qu’une accusation de haute trahison, et nous ne supposons pas qu’on en soit là. S’il ne s’agissait que de dégager la politique de la France de ce tourbillon de manifestations imprévoyantes et de donner au gouvernement, par un témoignage de confiance, une force nouvelle dans l’exécution des lois, pourquoi ne pas le dire plus simplement sans recourir à des déclamations irritantes? Pourquoi faire une œuvre de parti là où il n’y avait à faire qu’une œuvre de politique et de patriotisme?

C’est la fatalité et le danger de ces luttes mal engagées, rapidement poussées à l’extrême par les passions contraires. M. Gambetta s’écrie que le cléricalisme c’est l’ennemi, et il demande ce qu’on fera pour combattre l’ennemi. M. le comte de Mun, à son tour, déclare que l’ennemi c’est le radicalisme, et il demande comment on entend sauvegarder la paix intérieure menacée par les excès révolutionnaires. Les uns lisent des journaux prétendus conservateurs qui ne respectent ni les institutions ni les alliances de la France; les autres lisent des journaux prétendus républicains qui outragent toutes les croyances et quelquefois les souverains étrangers. Ceux-ci croient servir la république par la