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LE
SALON DE 1877

I.
LA GRANDE PEINTURE.

Sganarelle disait qu’il y a fagot et fagot ; on ne doit pas en conclure qu’il y ait Salon et Salon. Les Salons se suivent et se ressemblent avec une affligeante monotonie : qui en a vu un en a vu dix. Sans s’embarrasser de chercher une voie nouvelle ou d’accuser leur manière avec un plus haut style ou une énergie plus grande, les peintres se traînent à la remorque des autres ou d’eux-mêmes, se laissent aller aux redites banales et aux poncifs surannés, et se contentent d’exposer toujours le même tableau sous un titre différent. Une Pandore dans une grotte succède à une Vérité dans un puits, une Vénus couchée à une Vénus debout, un portrait en robe bleue à un portrait en robe verte, une aurore rose à un crépuscule empourpré, une plaine de neige à un bois couvert de givre, un baptême de hameau à une noce de village, un Christ à la colonne à un Christ au tombeau. Le Salon de 1877 ne fait point exception. Il ressemble au Salon de 1876, de même que le Salon de 1878 ressemblera à celui de 1877. Comme chaque année, on dit, après une visite rapide : Il n’y a rien ; comme chaque année, on dit, après une sérieuse étude : Il y a pourtant quelque chose. C’est la même profusion annuelle de tableaux de genre, de paysages, de portraits ; c’est le même cortège, pauvre et maigre, de déesses nues et de femmes déshabillées, la même théorie de types bibliques et