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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 21.djvu/720

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neutralisés par les autres partis conservateurs. Ce ne serait rien de plus que la situation actuelle prolongée avec la constitution telle qu’elle a été faite, de sorte qu’en définitive la république, après être née de l’impuissance des partis monarchiques, continuerait à vivre de cette impuissance. Fort bien ! Ainsi c’est pour arriver à ce résultat, à cette constatation nouvelle de l’impuissance des partis monarchistes et de la nécessité de la république, c’est pour en revenir là qu’on aurait remué le pays, réveillé toutes les inquiétudes, engagé le chef de l’état lui-même dans une crise peut-être sans issue et ouvert des luttes où toutes les passions extrêmes vont se trouver aux prises pour se disputer une fois de plus notre malheureux pays ! Avouons-le, il y a pour les esprits sensés et patriotiques un insupportable supplice dans ces conflits à outrance que les partis se plaisent sans cesse à raviver au moment où ils seraient le moins opportuns. On a toujours la prétention d’en imposer, de dompter la raison publique avec ces dilemmes qui ne sont après tout que des jeux de polémique : la réaction conservatrice au risque d’aller jusqu’à l’empire ou le radicalisme avec tout ce qu’il entraîne. Eh bien ! non, tous ceux qui se sentent quelque fierté doivent refuser de courber leur raison devant ces dilemmes prétentieux. Aujourd’hui comme hier, entre le radicalisme et la réaction au nom d’un intérêt conservateur mal compris, il y a la politique modérée, libérale, patiente, celle qui aurait pu faire vivre la monarchie constitutionnelle, si les royalistes ne l’avaient tuée d’avance, celle qui peut continuer à faire vivre la république, si les républicains veulent bien s’éclairer de l’expérience récente, éviter les fautes qu’ils ont commises et se plier aux conditions d’un gouvernement sérieux. Il y a en un mot la politique du pays paisible, sensé et laborieux.

Qu’on en finisse une bonne fois avec les fantômes et les déclamations ! Mais dans tous les cas, c’est bien assez de nous débattre entre nous, sans faire intervenir l’étranger dans nos querelles intérieures. Franchement l’étranger joue un trop grand rôle dans les polémiques depuis quelques jours. Qu’on doive avoir toujours l’œil fixé sur certains points extérieurs, tenir compte de ce qu’on dit, de ce qu’on pense au dehors, ce serait une puérilité de l’oublier ; mais, quel que soit notre gouvernement, c’est notre affaire, c’est à nous de le rectifier ou de le remplacer. C’est bien le moins que dans des intérêts de partis on ne donne pas soi-même des alimens aux suspicions étrangères. C’est bien assez se servir de l’Allemagne et de l’Italie. On a bientôt compris à Rome que la crise qui venait d’éclater en France pouvait avoir sa gravité, qu’elle était digne d’attention, mais qu’elle ne devait pas conduire à des complications dont aucun gouvernement français ne pourrait avoir aujourd’hui la pensée. M. Depretis, M. Melegari, l’ont dit dans le parlement italien. Une lettre du roi Victor-Emmanuel à M. le maréchal de