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statistiques. Comme aucun ouvrage de ce genre n’avait encore été publié sur les âges préhistoriques, il est à croire que celui-ci fera époque dans la science et sera le point de départ de recherches nouvelles et méthodiquement dirigées.


III

Nous devons maintenant faire connaître les lieux où se sont rencontrés les produits de l’industrie du bronze. Les premiers pas de la science ont été difficiles et incertains, parce que les trouvailles se faisaient au hasard, par les mains d’hommes inexpérimentés : ils vendaient les antiquités au poids, quelquefois ils les détruisaient. Ainsi en 1859 dans une propriété de M. de Gourgue, près de Bordeaux, « les cultivateurs, en rentrant des champs, racontèrent à leur maître que dans la journée ils avaient trouvé un mort, qu’ils avaient essayé de lui briser la tête à coups de sabot, mais qu’elle était si grosse et si dure qu’ils n’avaient pu y réussir qu’avec leurs pioches. » Ils rapportèrent cependant une hache, une épée, de gros fils d’or et des fragmens de poteries. Voici ce qui arriva en 1865 pour la célèbre fonderie préhistorique de Larnaud (Jura). « Brenot fils, en sarclant des pommes de terre, découvrit un morceau de métal vert qui excita sa curiosité et celle de ses compagnons. Ils se mirent à fouiller le terrain et trouvèrent une quantité d’objets du même métal dans un espace d’un mètre carré environ. Le lendemain Brenot père alla avec un échantillon trouver à Lons-le-Saulnier un chaudronnier qui lui dit que ce bronze valait 1 fr. 40 cent, le kilo. Sur l’avis de cet homme, Brenot fut offrir sa trouvaille à un véritable amateur d’antiquités, M. Z. Robert, qui s’empressa de l’acquérir. Elle se composait d’environ dix-huit cents pièces, pesant 66 kilogrammes et demi. » tout ce bronze avait donc failli repasser par le creuset du fondeur. Il est maintenant au musée de Saint-Germain, dont il forme un des groupes les plus intéressans. Citons encore un fait. La fonderie antique de Vernaison (Rhône) fut trouvée en 1856 dans la propriété de M. D… Le poids total des bronzes était de 16 kilogrammes ; mais le directeur du musée de Lyon à cette époque n’en conserva qu’une faible partie : « Nous avons fait choix, dit-il, des objets complets ou mutilés les plus dignes de figurer au musée ; le reste a été rendu à M. D…, qui se propose de faire fondre une urne commémorative avec une inscription qui rappelle le souvenir de cette découverte. « Malgré ces périls dont la science préhistorique est environnée, les gisemens de bronze en France, en Savoie, sont déjà si nombreux et si bien caractérisés que M. E. Chantre a pu les classer en catégories que nous partagerons nous-même en deux groupes : les gisemens visibles et les