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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 21.djvu/947

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 juin 1877.

Le jour du mois de mai où a éclaté en France une révolution de pouvoir si imprévue, M. le président de la république disait dans le message par lequel il annonçait aux chambres ses résolutions et la formation d’un nouveau ministère : « Pour laisser calmer l’émotion qu’ont causée les derniers incidens, je vous inviterai à suspendre vos séances pendant un certain temps. Quand vous les reprendrez, vous pourrez vous mettre, toute autre affaire cessante, à la discussion du budget, qu’il est si important de mener bientôt à terme. D’ici là, mon gouvernement veillera à la paix publique… » Cette trêve, qui sous la forme d’une prorogation parlementaire a suivi « l’acte du 16 mai, » est maintenant près d’expirer. D’ici à deux jours, les chambres vont se retrouver à Versailles pour discuter le budget ou pour toute autre chose. Un mois s’est écoulé, un mois entier laissé à l’apaisement des esprits, à la réflexion, aux négociations et aux combinaisons. Les partis ont eu le temps de s’interroger et de se consulter, d’organiser la campagne qu’ils se proposent d’engager dès la première heure de la session. Le ministère, lui aussi, a eu le temps de s’établir, de changer des préfets et des sous-préfets, de se préparer aux éventualités dont son avènement peut être le prélude, et, grâce à Dieu, il n’a pas eu à doubler les patrouilles pour protéger la « paix publique » sur laquelle il avait promis de veiller. Le pays lui-même à son tour, le pays enfin a eu le temps de voir le spectacle de loin, d’écouter les commentaires sans trop comprendre peut-être le secret de tous ces mouvemens inattendus.

Oui sans doute, pendant ce mois de prorogation tout le monde a eu le temps de voir, de réfléchir, et, à tout prendre, il y a quelques exagérations qui ont disparu. Les craintes de coup d’état, si elles ont jamais existé, ont singulièrement diminué. Les nuages extérieurs sont moins sombres, s’ils ne sont pas complètement dissipés. La tension universelle est peut-être moins violente qu’il y a un mois, on est moins disposé à