juste répulsion par les enseignemens d’une philosophie très éclairée et très humaine, a reconnu avec un grand plaisir que sur ce point il était pleinement d’accord avec l’esprit comme avec la lettre de l’Évangile. Mais encore une fois cette découverte est relativement récente, de nos jours même des voix sinistres voudraient presque nous faire croire qu’elle est encore contestée, et tout ce qu’on a le droit de dire, c’est que l’islamisme, en ordonnant la guerre sainte par la voix même de son fondateur, a contracté un vice originel dont il ne pourra se purifier entièrement sans se renier lui-même. Le christianisme au contraire, en réprouvant désormais la contrainte comme moyen de propagande, n’en est que plus fidèle à lui-même. Cela n’empêche que longtemps il y eut cette différence entre lui et l’islamisme que celui-ci tolérait les religions vaincues à la condition que leurs adhérens payassent tribut au vainqueur musulman, tandis que, durant des siècles, le vainqueur chrétien n’offrit aux populations terrassées par ses armes d’autre alternative que la conversion ou la mort.
Au chapitre de la polygamie, la critique impartiale éprouve un certain embarras. Voilà certainement un autre vice indélébile de la constitution sociale des peuples musulmans, un vice que Mahomet sanctionna par son exemple personnel. Si les nations musulmanes semblent condamnées à une décadence irrémédiable, c’est en grande partie à la polygamie qu’elles le doivent. Et pourtant, quand on se reporte au temps et au pays, il n’est pas de réforme plus bienfaisante ni plus hardie que celle dont Mahomet prit l’initiative en faveur des femmes. Rappelons-nous ce que nous avons dit sur la condition déplorable qui leur était faite en Arabie. Si Mahomet avait voulu interdire la polygamie, il eût certainement échoué. Pas de comparaison possible sur ce point avec sa réforme religieuse proprement dite. Les Arabes au fond étaient assez disposés à reconnaître l’unité divine : il y avait de vieilles et mystérieuses traditions favorables au monothéisme ; mais oncques l’ombre d’un scrupule ne s’était élevé dans une tête arabe au sujet de la polygamie. L’état des choses sur ce point ressemblait toujours à celui dont témoigne l’histoire des Juges d’Israël, de David, de Salomon, et le fait est qu’en comparaison la loi musulmane fut un progrès marqué. Elle limita la polygamie, ainsi que le droit absolu du divorce. Le nombre des femmes légitimes fut borné à quatre. La femme divorcée, qui auparavant perdait jusqu’à son douaire, reçut le droit de l’emporter en quittant la maison conjugale. Les filles, qui, avant l’islam, ne pouvaient rien hériter, eurent droit depuis lors à la moitié de la part d’un fils. Les mariages entre les fils d’un autre lit et leurs belles-mères furent notés d’infamie. Enfin Mahomet réussit à détruire l’abominable coutume du meurtre des petites filles. Il est absolument