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qui était nécessaire pour élever quelques monumens somptueux. A la place, des étangs de Néron fut bâti l’amphithéâtre FIavien, qu’on appelle aujourd’hui le Colisée. On commença, sur l’Esquilin, les thermes qui prirent plus tard le nom de Titus, et au bas de la rue Palatine, sur la voie Sacrée, un arc de triomphe élégant rappela le souvenir de la prise de Jérusalem. Ces édifices, par lesquels la dynastie nouvelle essayait de se rendre populaire, avaient cet avantage sur ceux de Néron que le peuple en profitait. « Rome, disait un poète, est remise en possession d’elle-même ; grâce à toi, César, ce qui était le plaisir d’un seul homme sert à l’utilité de tous. »

L’empire était donc revenu au Palatin, et cette fois pour n’en plus sortir. Vespasien et Titus pratiquèrent la politique d’Auguste, n’épargnant aucune dépense pour les monumens destinés au public, tandis qu’ils vivaient eux-mêmes simplement, comme des particuliers plutôt que comme des princes. Ils s’étaient accommodés, à ce qu’il semble, des anciens palais impériaux, qu’on avait réparés après l’incendie ; mais cette simplicité ne fut pas du goût de Domitien, leur successeur. Celui-là avait la manie, ou, comme parle Plutarque, la maladie des constructions. Peu de princes ont élevé des bâtimens aussi magnifiques, et l’on nous dit que son palais était le plus beau de tous. Un homme qui se faisait adorer, qui ordonnait qu’on le traitât, dans les suppliques qu’on lui adressait, « de maître et de dieu », ne pouvait habiter « qu’un sanctuaire » ; c’est ainsi qu’il appelait lui-même sa maison et qu’il voulait qu’on l’appelât. Il était naturel qu’il essayât de s’en faire une qui fût digne de ce nom.

Ce palais, qui faisait l’admiration des contemporains, les fouilles de ces dernières années l’ont mis complètement au jour. Ce n’est pas tout à fait une découverte ; vers le commencement du siècle dernier, le duc de Parme, François Ier, qui possédait cette partie de la colline, la fit fouiller par le savant Bianchini ; on y trouva un amas considérable de ruines, et l’on reconnut sans hésiter qu’elles devaient appartenir au palais de Domitien. Il était alors en bien meilleur état qu’aujourd’hui, et plusieurs salles avaient conservé des restes importans de leur décoration primitive. Après qu’on eut pris tout ce qui pouvait s’emporter pour orner les musées des Farnèse, les ruines furent de nouveau recouvertes de terre et comblées pour un siècle et demi. M. Rosa nous les a définitivement rendues, et comme cette fois elles ont été plus complètement déblayées et dégagées, que le plan général de l’édifice est aisé à reconstruire et qu’il semble mieux répondre à l’idée que nous nous faisons d’un palais, c’est aussi l’endroit du Palatin que les étrangers visitent le plus volontiers et dont ils gardent le meilleur souvenir. Nous avons heureusement ici, pour être sûr de tout bien comprendre, pour nous rendre un compte exact de l’ensemble et des détails, la même