Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 22.djvu/421

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’impôt, et les tarifs de transport sont à vrai dire un impôt, il est reconnu qu’il y a toujours un point précis où l’impôt produit le maximum. Au-delà, l’augmentation de l’impôt ne couvre pas la diminution de la consommation ; en-deçà, la diminution de l’impôt n’est pas couverte par l’augmentation de la consommation. Ce point particulier, qu’il faut découvrir dans chaque cas, l’expérience de toutes les nations l’indique pour le port des lettres postales à l’intérieur aux environs de 15 centimes. Or la France est le seul pays du monde où les lettres à l’intérieur circulent encore au prix de 25 centimes. Elle est aussi le pays qui paie le plus cher le port des imprimés, des cartes postales, des dépêches télégraphiques. Il y a là des réformes urgentes à opérer, qui seront l’éternel honneur du ministre des finances qui les prendra une bonne fois en mains et les fera adopter par le parlement ; mais ce ministre sera surtout béni du commerce, parce que le commerce sait bien quel avantage il rencontre dans le bas prix de la correspondance, du port des lettres et des imprimés. Il le sait si bien qu’il envoie aujourd’hui en paquets une partie de ses imprimés au dehors, pour de là les faire rentrer séparément et distribuer en France par la poste, parce que de la sorte cela lui coûte moins. En vérité, quand de telles anomalies existent, n’est-il pas temps qu’elles disparaissent ? Il y a mieux ; quand on abaissera le prix du port des correspondances, il se produira ce phénomène bien connu, c’est que les caisses du fisc se rempliront d’autant plus qu’on diminuera jusqu’au point minimum voulu le prix du port, soit des lettres, soit des dépêches ; mais ce qu’il faut abaisser surtout, si l’on veut que le commerce et l’industrie de la France prennent tout leur essor, ce sont les tarifs de transport sur toutes nos voies ferrées. Quel que soit aussi l’avantage pour les compagnies de ce qu’on nomme les tarifs différentiels, il faut enfin faire en sorte que ces injustices criantes disparaissent en vertu desquelles une balle de coton, transportée du Havre à Bâle et de là à Épinal, coûte moins que si elle allait directement du Havre à Épinal. Si de tels faits devaient trop longtemps se produire, on arrêterait totalement le commerce et l’industrie nationale, qui peu à peu céderaient la place au commerce et à l’industrie de l’étranger. Ce n’est pas là probablement le résultat auquel on veut arriver.

Depuis la guerre franco-allemande, les conditions économiques de l’Europe sont changées au détriment de la France, et il ne faut pas s’ingénier à les faire changer encore davantage. Pourquoi n’abaisserait-on pas résolument les tarifs de transport sur toutes nos voies ferrées, — dût-on pour cela voter, dans une loi de salut public, le rachat de tous les chemins de fer par l’état, — quand un