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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 22.djvu/607

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Thérèse de Gorla, et il y était, ou du moins sa troupe, depuis quelque temps déjà, puisqu’un acteur, Pierre Réveillon, y avait signé comme parrain dès le mois de décembre 1652.

Ici les documens deviennent plus nombreux. Molière se fixe, et Lyon devient comme le quartier-général où la troupe, après chaque campagne, viendra chercher le repos et retrouver les applaudissemens, l’accueil ami du public familier.

C’est à Lyon, comme on sait, que Molière subit l’influence italienne, c’est à Lyon qu’il trouve, encore vivant, le souvenir de Nicolo Barbieri, dit Beltrame, l’auteur de l’Inavvertito, c’est à Lyon que, sur le modèle de la Emilia et de l’Inavvertito, Molière compose et fait représenter l’Étourdi, Les érudits ne s’accordent pas sur la date précise de cette représentation : M. Loiseleur la place au mois de janvier 1653, M. Despois la mettait aux premiers jours de l’année 1655; une phrase de la Notice de La Grange autorise l’hypothèse de M. Loiseleur, une mention de son Registre donne raison à M. Despois : la question est encore pendante. Ce n’est pas malheureusement la seule date qui nous échappe, et du mois de mars au mois d’août 1653 une troisième fois la troupe s’éclipse et disparaît. Peut-être a-t-elle donné des représentations dans les villes voisines, parmi lesquelles on nomme Vienne. En effet, il y a bien un témoignage formel, mais dont on ne saurait tirer grand parti, puisqu’il reporte les représentations de Molière jusqu’en 1641, et qu’en 1641 Molière, de science certaine, est encore sur les bancs du collège. L’embarras est d’autant plus grand que le texte qualifie Molière « d’excellent auteur comique, excellentissimus comœdiarum scriptor ; » à peine comprendrait-on cette épithète superlative après l’Étourdi et le Dépit amoureux, c’est-à-dire après 1656. Nous ne le retrouvons qu’au mois d’août. Armand de Bourbon, prince de Conti, frondeur lassé, frondeur réconcilié, suivi d’une cour en liesse, bien pourvue de gouvernemens, d’évêchés et de pensions, vient d’arriver en Languedoc et de s’établir près de Pézenas, dans sa maison de La Grange. Molière s’y présente avec ses comédiens, et d’abord y réussit assez mal au gré de Mme de Calvimont et du prince. Mais l’aumônier, Daniel de Cosnac, à qui nous devons ces détails, et Sarrasin, le secrétaire des commandemens, interviennent fort à propos, et la troupe de Molière l’emporte sur la troupe d’un certain Cormier, qui lui disputait la faveur et la clientèle du prince. On leur donne pension, et ils prennent le titre de « comédiens de Mgr le prince de Conti. » Au mois de décembre, ils sont encore à La Grange, qu’ils ne quittent probablement qu’après le départ du prince pour Paris. C’est à Lyon qu’ils passent la plus grande partie de l’année 1654 : on connaît l’acte de baptême