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tant pour cent des bénéfices. Si les bénéfices étaient insuffisans pour rémunérer les ouvriers aussi largement qu’ils le désireraient, je dirais à ceux-ci : Supportez comme ceux qui vous emploient votre part de la perte ; mais, si les recettes sont suffisantes pour donner un dividende, alors, au nom du ciel, que l’ouvrier qui en est digne ait aussi sa part du bénéfice. »


Il n’est pas sans intérêt de faire observer qu’un des membres du cabinet, le ministre des finances, M. Sherman, qui est citoyen de l’Ohio comme le président, se trouvait à Cleveland pendant que la convention républicaine y délibérait, et qu’il est le coreligionnaire politique et l’ami personnel de M. Stanley Matthews et du juge West. Lui-même s’est prononcé pour que le congrès intervienne législativement dans l’administration des chemins de fer ; il estime que cette intervention serait justifiée par l’article de la constitution qui confère au congrès le droit de régler le commerce avec les nations étrangères, avec les tribus indiennes et entre les états membres de la confédération. M. Sherman s’est montré moins favorable à l’idée d’établir un bureau, c’est-à-dire une administration de l’industrie, dont la création aurait pour conséquence de faire intervenir le gouvernement fédéral dans les questions industrielles et serait contraire à l’esprit des institutions américaines. L’opinion s’est du reste accréditée aux États-Unis que le conseil des ministres s’est plusieurs fois occupé des questions soulevées par la grève des chemins de fer et par la stagnation de l’industrie, et que le président consacrera à ces questions une partie de son prochain message.

La perspective de voir l’autorité fédérale, plus éloignée, mais par cela même plus affranchie des passions et des influences locales, plus impartiale, plus capable aussi d’assurer une protection efficace aux intérêts dont elle a charge, se substituer aux gouvernemens locaux dans le contrôle à exercer sur les chemins de fer ne paraît pas accueillie défavorablement par les compagnies. Le colonel Thomas Scott, président du Central-Pensylvanien, dans une lettre adressée à la North American Review, fait ressortir avec quelque amertume que les lignes mises sous séquestre ont été protégées plus promptement et plus efficacement que celles des compagnies qui font honneur à leurs affaires, parce que les administrateurs des séquestres, nommés par l’autorité fédérale, ont pu s’adresser directement aux juges fédéraux et requérir l’assistance des troupes fédérales, tandis que les compagnies, contraintes de s’adresser d’abord aux autorités municipales, puis aux gouverneurs des états, qui recouraient à leur tour au président, ont vu leurs propriétés détruites avant qu’il pût leur arriver aucun secours. N’est-ce pas dire