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gouvernement anglais et les diverses sociétés qui se succédèrent pour cet objet de la colonisation de la Nouvelle-Zélande un dialogue qu’on peut résumer à peu près en ces termes :

« Nous ne pouvons pas, disait le Colonial office, autoriser une entreprise qui ne pourrait s’effectuer qu’au détriment des Maoris et au mépris des droits qui leur ont été reconnus par la couronne comme possesseurs du sol qu’ils occupent. — Mais comment, répondaient les sociétés colonisatrices, cette entreprise irait-elle à leur détriment, puisque nous nous proposons d’acheter leurs terres et non de les leur prendre ? Si les Maoris sont légitimes possesseurs du sol, ne sont-ils pas libres de le vendre comme nous de l’acheter, et alors en quoi de pareilles transactions sont-elles différentes de celles qui transportent parmi nous la propriété de telles mains dans telles autres ? — Ces transactions sont frappées d’avance d’invalidité, reprenait le Colonial office. Quoique propriétaires du sol, les chefs maoris sont cependant sujets de la couronne. Ils ne peuvent traiter avec vous sans son autorisation d’une part, et tout marché sera nul qu’elle n’aura pas approuvé ; d’autre part, elle n’a pas prévu le cas où les terres cesseraient d’être entre les mains des Maoris, sans cela il est évident qu’elle se les serait attribuées comme elle s’est attribué les terres australiennes, et qu’elle aurait réglé de son propre mouvement ou d’accord avec le parlement les formes sous lesquelles elle pourrait ou devrait s’en dessaisir au profit des particuliers. Ce que vous cherchez équivaut donc à vous substituer aux droits de la couronne et à former une colonie qui ne relèvera en réalité que de vous seuls, sauf le cas où votre entreprise vous créerait des difficultés avec les indigènes. Ce jour-là nous serions certainement appelés à intervenir, soit pour vous prêter main-forte au mépris des engagemens que la couronne a contractés, ce que nous ne voulons pas faire, soit pour vous désavouer, vous nos nationaux, et vous livrer aux représailles que vous auriez méritées, ce que nous ne pourrions pas faire. Aussi, pour nous éviter l’une ou l’autre de ces alternatives, nous vous refusons la charte que vous demandez. »

La ténacité anglaise est connue, et ces refus répétés n’étaient pas pour décourager les promoteurs de cette entreprise. Quelque honnêtes et bien fondés que fussent d’ailleurs les scrupules du gouvernement anglais, il y avait quelque chose de réellement absurde dans l’existence de cette colonie qui était menacée de rester indéfiniment sans colons, parce qu’une poignée de sauvages se trouvaient les premiers occupans d’un sol qu’ils étaient impuissant à cultiver, et les personnages considérables qui avaient formé ces diverses sociétés colonisatrices profitèrent habilement de la fausse position où restait placé le Colonial office. En 1839, nouvelle société, et celle-là définitive, sous les auspices de lord Durham. Parmi ses