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Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 24.djvu/148

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Cache-toi derrière la porte et pousse un grand cri pour l’effrayer, » Mais la muzzella garde obstinément le silence. « Il n’y a plus qu’un moyen, dit le compère, couche-toi sur ton lit et fais le mort, il faudra bien qu’elle te pleure, et tu l’entendras parler. » Ainsi fit l’homme, et la femme pleura en effet en criant de toute sa force : « O mon mari, mon mari ! Ô les souliers étroits, étroits ! ô la robe courte, courte ! ô la peur derrière la porte ! ô mon mari, mon mari, qu’ai-je à faire à présent ? » Seulement elle prononça ces mots en bégayant et en balbutiant, ce qui faisait une, lamentation grotesque. Malite mmio, malite ! a cappa tetta tetta, a vunnelluccia cotta, cotta, a paula allete a potta ! malite mmio, malite mmio, comm’ hagge’ a fà ? Le mari sauta aussitôt à bas du lit et dit à sa femme : « Ah ! c’est pour ça que tu ne voulais point parler ! tu es donc bègue ? que je t’y reprenne, et tu auras affaire à moi. » voilà comment il entendit parler sa femme.

Voici une autre anecdote, Natale, dont nous trouvons une variante dans le Moyen de parvenir. La chambrière d’une veuve, dit Beroalde, était jolie, mais un peu follette ; « sur quoi sa maîtresse lui disait toujours qu’elle n’avait point d’esprit. Or est-il qu’il y avait un jambon à la cheminée ; et cette fille, le voyant là si longtemps, s’en ennuyait. Elle demanda à madame si elle le mettrait cuire. Non, dit-elle, c’est pour les Pâques. Cette fille en fit le conte à quelques autres de ses compagnes, qui s’en gaussaient en son absence. Mais le clerc du notaire Bardé ne fut point si sot, qu’il n’y prît garde pour éprouver le sens de la fillette. Un jour que la bonne femme était allée à sa métairie, et qu’elle avait laissé Mauricette toute seule, il vint heurter et demanda madame. Mauricette dit qu’elle n’y était pas. — J’en suis bien marri, parce que je suis Pâques qui étais venu quérir le jambon qu’elle m’a promis. — Il entra, et la chambrière le laissa paisiblement prendre le jambon. » Arrêtons-nous ici, la fin de l’histoire est leste.

A Pomigliano, les choses se passent autrement : c’est un mari et une femme qui sont en scène. Le mari possède un cochon et le garde pour Noël. La femme se met à la fenêtre et interpelle tous les hommes qui passent en leur demandant) « Est-ce vous qui vous appelez Noël ? » Un curieux lui répond : « C’est moi, » et elle lui donne le cochon, qu’elle a préalablement décoré d’une longue chaîne d’or et de pendans d’oreilles en perles. Le même conte se fait à Bologne, seulement il y est question de Janvier, non de Pâques, ni de Noël. Dans les Pouilles, on raconte l’histoire d’un père qui a beaucoup d’enfans. Sa fille cadette est le souffre-douleur de la maison, laide et sotte. On lui donne les reliefs des repas et le rebut des habits. Un jour son père a pitié d’elle et lui dit : « voici dix ducats ; quand mai viendra, tu auras une robe neuve. » La pauvre fille ne