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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier 1878.

S’il y eut jamais un moment où la France ait eu besoin de ne pas se perdre dans de stériles conflits intérieurs, c’est ce moment où se débattent des intérêts universels, et s’il y eut jamais un parti sommé en quelque sorte par les circonstances de savoir se servir de sa fortune, c’est celui qui dispose aujourd’hui de la direction des affaires par le pouvoir comme par la majorité du parlement. M. Gambetta, qui a des intermittences de sagacité pratique et d’emportement, qui flotte trop souvent entre sa passion et sa raison, M. Gambetta disait l’autre jour, en passant à Marseille, que pour un parti une année de gouvernement était plus fructueuse que bien des années d’opposition. Eh bien ! il faut voir maintenant si les républicains, qui ont l’ascendant sous toutes les formes, par toutes les élections, sauront se plier aux nécessités du gouvernement, s’ils en prendront l’esprit, les mœurs, la discipline, la modération. Il s’agit de savoir si la république, qui a pour elle la constitution, le ministère, la majorité des scrutins, aura son règne régulier, paisible et durable, ou si elle restera une expérience agitée, à la merci des réactions provoquées par elle-même.

C’est là toute la question que les dernières crises n’ont tranchée qu’à demi, que des efforts suivis et persévérans peuvent seuls résoudre. Assurément depuis deux mois une grande et favorable transformation s’est accomplie. La situation a singulièrement changé. Il n’y a plus l’irritation et la méfiance qui enflammaient les esprits, qui divisaient les pouvoirs publics ; il n’y a plus ces défis, ces appareils de résistance qui menaçaient la nation des plus périlleuses épreuves. La paix est revenue avec un ministère, expression vivante et fidèle d’une victoire légale d’opinion ; le calme est rentré dans le parlement comme dans le pays. Il a suffi de quelques jours pour que la nécessité d’une modération, sans laquelle il n’y a point de paix véritable, recommençât à se faire