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On ne pourra donner de ces phénomènes une explication complète que le jour où l’on connaîtra la constitution du courant électrique ; et, comme on n’en sait pas aujourd’hui le premier mot, force est de se contenter d’idées vagues. On admet que le courant électrique, une fois commencé par le contact des charbons, se continue, quand on les sépare, à travers leur vapeur qui sert de conducteur, vapeur formée par la température élevée, entraînée par le courant et illuminée pendant son trajet. Vient-elle à manquer, le courant s’arrête et tout s’éteint. Quant à cette immense température, c’est une loi physique que le courant électrique échauffe tous les corps qu’il traverse en raison de la résistance qu’ils lui opposent, et il est tout simple que, trouvant dans cette vapeur, en un espace restreint, une résistance immense, il y produise la plus haute température connue.

Quoi qu’il en soit de cette explication, prenons le phénomène en bloc, aussi bien dans les charbons que dans l’arc, et mesurons la quantité de lumière émise. Quand deux luminaires placés à la même distance éclairent également, on dit qu’ils sont égaux en quantité. Si, pour obtenir des éclairemens égaux, il faut reculer l’un d’eux à une distance double, ce qui réduit son effet au quart, il vaudra quatre fois plus que l’autre ; s’il faut l’éloigner trois fois plus, on en conclura qu’il est neuf fois plus fort, et en général les quantités de lumière émises par deux luminaires sont en raison directe du carré des distances où il faut les mettre pour qu’ils éclairent également. On est convenu en outre de comparer tous les foyers à une lampe carcel de grand modèle qui brûle en une heure 42 grammes d’huile épurée de colza, et dès lors on dira, pour exprimer une quantité de lumière quelconque, qu’elle est égale à un, deux ou cent becs carcel. Ceci compris, cherchons la valeur d’un régulateur électrique. Parmi toutes les évaluations qui ont été publiées, je vais choisir celle qui me paraît la plus incontestable, ayant été effectuée par un de nos maîtres en mécanique appliquée, M. Tresca. L’appareil étudié par M. Tresca était une machine Gramme de grand modèle exécutant 1,000 tours à la minute. Il fut reconnu qu’avec cette vitesse elle donnait dans un régulateur Serrin une quantité de lumière équivalente à 1860 becs carcel. Ce nombre est énorme, si énorme qu’il dépasse la limite des comparaisons que notre esprit sache faire avec précision. On donne une idée plus exacte de cette immense production en disant, par exemple, que pour faire la même somme de lumière il faudrait brûler 78 kilogrammes d’huile, à peu près un hectolitre, en une heure, ou bien le volume de gaz d’éclairage contenu dans un ballon de 9 mètres de diamètre ; mais il ne faut pas croire que tous les éclairages électriques ont une aussi