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L’UNION FRANÇAISE DE LA JEUNESSE


Depuis trois ans, une réunion de jeunes gens a fondé des cours pour les ouvriers ; l’idée de cette association peut se résumer en deux mots : faire profiter ceux qui n’ont reçu que l’instruction primaire des fruits d’une éducation plus large en leur donnant comme professeurs les élèves frais émoulus de nos grandes écoles. Il ne faut pas en effet avoir plus de vingt-cinq ans pour aspirer à monter dans ces chaires improvisées et entreprendre de développer devant un auditoire attentif les leçons que l’on a reçues soi-même. Maîtres et élèves doivent beaucoup profiter de cette institution, car les uns sont ainsi obligés à réapprendre ce qu’ils se seraient empressés peut-être d’oublier, ils se forment de plus à un art nouveau pour eux : l’art de la parole ; les autres, les auditeurs, en peu de leçons, sont mis au courant des idées qui traversent nos écoles, ils apprennent l’histoire de leur pays, de leur langue, et par des cours, appropriés souvent à leur métier, on les met au courant des inventions nouvelles, des pratiques qui facilitent leur travail. Enfin on les détourne ainsi des cabarets, des mauvais lieux, on élève leur esprit vers des objets dignes de toute l’attention d’hommes libres, prenant part dans, une certaine mesure à la conduite des affaires de leur pays.

Si l’Union française de la jeunesse a institué des cours d’histoire, de littérature, de dessin, de chimie, de physique, d’arithmétique, elle n’a pas oublié l’étude de nos lois au point de vue pratique. Le droit civil, commercial, l’économie politique, font partie de son programme, et sont enseignés de manière à donner aux ouvriers une idée juste de leurs droits et devoirs vis-à-vis de la société ; mais dans ces réunions il doit y avoir certains sujets difficiles à aborder, difficiles à faire comprendre à ces intelligences neuves que souvent des orateurs de club ont perverties par des déclamations oiseuses et dans des intentions perverses. Les jeunes professeurs de l’Union française ont pour tâche de ramener l’esprit de leurs auditeurs à des sentimens meilleurs, et vis-à-vis de la société ce sera leur plus grand mérite. Par une diffusion juste des lumières ils peuvent arriver à rendre du calme à des intelligences dévoyées, à leur montrer le chemin qu’elles ont à suivre et ce qu’elles doivent à la France, leur pays. C’est là une belle mission, qu’ils sauront remplir, et nous devons, en leur facilitant les moyens de faire progresser leur œuvre, les remercier d’avoir déjà vécu trois ans, et nous associer à tous leurs efforts. Hier l’Union française de la jeunesse a donné une matinée au théâtre de la Gaîté. Le programme de cette journée était fort bien rempli, et le concours du Théâtre-Français en a assuré le succès. Nous espérons que les membres de cette association sauront donner plus d’extension à leur société en multipliant les matinées dans le genre-de celle de dimanche.


Le directeur-gérant, C. BULOZ.