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Mycènes pour se mettre à l’œuvre, il était décidé. Au mois d’août 1876, soixante-trois ouvriers commencèrent les travaux. Nous ne parlerons pas de ceux qui, avec Mme Schliemann, fouillèrent la trésorerie située au pied de l’acropole : les autres, sous la direction de M. Schliemann lui-même, attaquèrent à la fois la porte des lions, et l’espace situé au-delà, près de la muraille qui ferme l’acropole du côté de la plaine.

Le seuil de la porte des lions fut bientôt mis au jour, — qu’il n’avait pas vu depuis plus de deux mille ans. On put constater la hauteur de la porte, qui n’est presque pas plus haute que large, — près de quatre mètres, — et que fermaient des battans épais, fixés par d’énormes verrous. Une seconde porte fut découverte, à quelques pas après la première. Entre les deux, dans une sorte de corridor, une niche d’un mètre et demi de haut a été ménagée dans le mur. M. Schliemann veut y voir la loge d’un concierge préhistorique : mais il est plus probable que c’était une sorte de guérite pour un factionnaire. L’examen de cette double entrée confirme ce que nous avons dit de l’impossibilité de pénétrer dans l’acropole avec des chariots, — sauf peut-être avec des chars de combats.

La grosseur des blocs à enlever ne permit pas de déblayer complètement les abords de la porte des lions. M. Schliemann dirigea le gros de ses travailleurs vers l’intérieur, encouragé par des trouvailles de tous les instans. La terre présentait un amas de débris de tous genres, ainsi qu’il arrive partout où les hommes ont demeuré. Les anciens habitans du Danemark ont formé peu à peu de véritables collines avec les restes de leurs repas et les silex émoussés : de même à Mycènes le sol s’est élevé par l’amoncellement des débris à plusieurs mètres au-dessus du niveau primitif. Les objets trouvés en premier lieu jettent un jour nouveau sur l’histoire mycénienne, en prouvant que la ville ne fut pas toujours déserte, après le sac de 468, comme l’ont écrit plusieurs historiens. Le sol fouillé par M. Schliemann recelait un grand nombre de vases, de médailles, des objets de fer datant, à n’en pas douter, de l’époque macédonienne. Mycènes a donc été habitée à cette époque ; mais elle ne fut pas pour cela relevée de ses ruines, et ces Mycéniens de la décadence semblent avoir été d’assez pauvres hères, demeurant dans des huttes de torchis ou de bois. Ils n’avaient pas même de monnaie, comme les Tirynthiens, et comme la plupart des villes grecques : ils n’ont laissé que des objets de peu de valeur. Cependant ce ne fut pas une occupation passagère : l’accumulation des décombres montre que l’existence de la nouvelle Mycènes s’est prolongée pendant plusieurs siècles.

À trois ou quatre mètres de profondeur, les objets changèrent de