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L’ENFANCE À PARIS.

enfans dont les familles soient d’origine agricole et qu’elle n’entreprenne point de faire des agriculteurs avec des petits Parisiens qui y sont tout à fait impropres. J’espère cependant que mes lecteurs me pardonneront la fatigue que ces détails ont dû leur causer, si j’ai pu par là leur faire oublier ce que la première partie de cette étude avait d’attristant. Après avoir pénétré si avant, trop avant peut-être dans les bas-fonds d’une grande ville, il y a quelque chose qui console à trouver presque partout le bien en lutte avec le mal, et la charité aussi ingénieuse que le vice. Cependant, malgré ce grand déploiement que j’ai décrit, quelques personnes ont pensé que ces efforts étaient encore insuffisans. Elles se sont demandé si, entre ces établissemens, purement charitables, qui sont destinés à prévenir, et les colonies d’éducation correctionnelle qui sont destinées à punir, il n’y avait pas lieu de créer des établissemens qui seraient destinés à prévenir et à punir à la fois, où l’entrée et le maintien cesseraient d’être volontaires sans que l’établissement eût cependant le caractère et imprimât la souillure de la prison. Beaucoup de travaux intéressans ont été écrits sur cette question ; beaucoup de propositions ont été mises en avant. Pour arriver à une solution pratique, il faut serrer les choses de près. En tout cas, il est indispensable d’étudier d’abord les résultats qui ont été obtenus dans un grand pays voisin du nôtre, où la charité publique et privée s’est trouvée aux prises avec des difficultés immenses dont elle a à peu près triomphé. Si je demande en effet qu’on ne nous humilie point par de perpétuelles comparaisons avec l’Angleterre, où on nous attribue l’infériorité sans savoir souvent ce qui se passe chez nous, je ne suis pas non plus, je l’espère du moins, de ceux qu’un sot patriotisme aveugle, et qui méconnaissent ce qui se fait de grand et de bien de l’autre côté de la Manche. Je crois cependant qu’il faut entreprendre ces études comparatives plutôt dans la pensée d’en tirer des indications instructives qu’avec le parti-pris d’arriver à une conclusion formelle quant à la supériorité d’un des deux peuples sur l’autre. Ces appréciations d’ensemble sont toujours sujettes à contestation, tandis qu’il y a tel emprunt de détail dont on ne saurait méconnaître l’utilité. C’est dans cet ordre d’idées que je m’efforcerai plus tard d’exposer la législation anglaise sur le vagabondage et la mendicité, et les résultats que cette législation a produits en particulier dans la ville de Londres.

Othenin d’Haussonville.