heures du soir, il fumait, ne flambait plus et commençait à s’éteindre. De tous les incendies allumés par ordre du comité de salut public, celui du Palais-Royal est le seul qui fut partiellement dominé, ou du moins cerné de telle sorte qu’il ne put répandre ses ravages sur les quartiers voisins ; s’il n’eût pas été combattu énergiquement et rejeté sur son propre foyer, on ne peut vraiment se figurer quels désastres, il eût causés ; si la Banque de France eût tardé d’une heure seulement à envoyer une première pompe et son équipe d’ouvriers sous la conduite de M. Louis Dupont, le malheur devenait irréparable, et tout le palais « marchand » était détruit. Les négocians le comprirent, et ils firent entre eux une souscription dont le montant, remis au marquis de Plœuc, fut distribué par lui aux ouvriers qui, sur son initiative, étaient partis en volontaires pour combattre le pétrole enflammé de la commune. Pendant la période de la révolte, la Banque était restée chez elle, veillant sur son trésor ; , elle n’en sortit qu’une seule fois, le 24 mai, à quatre heures du matin, pour courir la première combattre un danger qu’elle sut conjurer.
Pendant que la Banque de France sauvait le quartier du Palais-Royal, elle était enfin sauvée elle-même et voyait mettre un terme aux angoisses qui ne lui avaient pas été épargnées depuis le 18 mars. Les soixante-huit jours écoulés à travers des transes et des inquiétudes poignantes devenaient pour elle de l’histoire, histoire singulièrement pénible, mais glorieuse, et qui affirmait qu’à tous les degrés de l’échelle administrative chacun avait fait son devoir sans marchander ni le dévoûment ni la fatigue. On avait sauvegardé l’existence même du crédit de la France, et après tant de semaines tourmentées on se retrouvait intact, diminué seulement de quelques millions que l’état, représenté par le ministère des finances, s’était engagé à rembourser. Ce fut dans la matinée du 24 mai que les troupes françaises apportèrent la délivrance définitive. Les habitans du quartier, examinant les rues désertes dans l’espérance d’y voir passer quelques-uns de nos soldats, aperçurent un drapeau tricolore déployé sur l’énorme barricade qui défendait les approches de la place Vendôme. A sept heures du matin environ, les éclaireurs du 58e de ligne, débuchant par la rue des Petits-Champs et par le passage Radziwill, se montrèrent ; bientôt des détachemens plus nombreux les suivirent et prirent position autour de l’hôtel de La Vrillière. Le bataillon de la Banque massé dans la cour, sous le commandement de M. Bernard, était sous les armes ; la