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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 28.djvu/167

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50, 12 francs au lieu de 10, et 120 francs au lieu de 100, alors la taxe a paru exorbitante, et le mouvement des voyageurs a dû s’en ressentir. Sans doute, si on compare les recettes d’une année à l’autre, on les trouve toujours en augmentation, et on peut être tenté de croire que la taxe n’exerce aucune influence fâcheuse. Ce n’est pas ainsi qu’il faut considérer les choses. La richesse chez nous a une telle élasticité qu’elle se développe quand même malgré tous les obstacles ? seulement il est permis de supposer qu’elle se développerait davantage encore si ces obstacles n’existaient pas. Qu’on supprime demain les 2 décimes sur les transports à grande vitesse, et il y aura certainement une circulation plus grande de voyageurs, et avec elle un mouvement d’affaires plus considérable. Élever les impôts sur un point peut être le moyen de leur faire rendre davantage sur ce point-là, mais ce n’est pas toujours celui d’obtenir plus de l’ensemble des taxes. Or il n’y a que l’ensemble qui intéresse l’état. Ce qui importe à celui-ci, ce n’est pas que tel ou tel impôt rapporte plus, c’est que tous donnent davantage et qu’on ne perde pas d’un côté ce qu’on gagne de l’autre. Pour bien faire comprendre notre pensée, supposons qu’un impôt mal conçu donne 40 ou 50 millions par an et qu’il nuise pour un centième seulement au progrès de la richesse. Si ce progrès est de 3 milliards par année, et il doit bien être de ce chiffre aujourd’hui en France, le préjudice annuel causé par le mauvais impôt sera de 100 millions. Il aurait mieux valu ne pas l’établir. — Il se peut que les 2 décimes qui augmentent sensiblement le prix des transports aient cet inconvénient, et que les 76 millions qu’ils rapportent soient plus que perdus par le ralentissement qu’ils amènent dans le progrès de la richesse. L’état, en face de la fortune publique, est comme l’administrateur d’un grand domaine qui doit chercher ce qui améliore l’ensemble de ce domaine plutôt que telle ou telle partie en particulier. Pour toutes ces raisons donc, il nous paraîtrait utile que l’état réduisît la charge des 2 décimes qui pèsent sur les transports. Il ne faut pas perdre de vue qu’en Angleterre, pays essentiellement commerçant, cette taxe est de 5 pour 100 seulement, et qu’on parle tous les jours de la supprimer.

Dans le même ordre d’idées, on peut trouver à redire encore contre l’impôt de 3 pour 100 sur le revenu des valeurs mobilières. On a pourtant cru faire merveille en l’établissant. On a dit : Voilà des valeurs qui constituent une partie notable de la richesse publique, et qui, sauf pour un léger droit de transmission auquel elles sont soumises, ne paient rien à l’état sur le revenu qu’elles donnent, tandis que le revenu de la terre et des immeubles est grevé de 5 ou 6 pour 100 et souvent de plus. C’est une inégalité qu’il faut