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IV

Beaucoup de visiteurs terminent là leur visite à l’exposition chinoise et japonaise, et ne jettent qu’un coup d’œil distrait sur les deux dernières salles où sont exposées les denrées alimentaires, les matières premières, la véritable fortune de ces contrées. Si resserré que soit leur domaine, elles sont encore réduites à le disputer aux empiétemens du bibelot de second ordre, mis à la portée des petites bourses. Aussi cette exhibition est-elle, pour le Japon, beaucoup moins complète que celle de Vienne, dont on s’est contenté de réexpédier en partie les principaux échantillons. Quant aux Chinois, c’est à peine si, par acquit de conscience, ils ont fait le simulacre d’entasser dans un compartiment unique de rares spécimens de chacune des classes les plus intéressantes pour eux, comme un candidat embarrassé se laisse arracher une à une des réponses inachevées sur chaque point de son programme. Les instrumens de musique coudoient les tabacs, les insectes nuisibles se pressent à côté des matières tinctoriales, le tout sans autre indication de provenance que le nom de la douane expéditrice inscrite au catalogue. Ce n’est évidemment pas là une exposition digne d’un grand et riche pays comme la Chine ; le mieux est de ne le point juger sur ce tableau infidèle. Signalons seulement en passant un métier à tisser, une charrue, une roue à palettes, des modèles de meules dont les mécanismes ingénieux et lents attestent une nation inventive et laborieuse, mais peu pressée de vivre. Les ingénieurs s’arrêteront aussi devant une collection de bois qui voudrait être expliquée et devant les plans en relief de l’arsenal de Fou-tchéou, dont les travaux sont indiqués par une légende en français. Il faut savoir gré à notre éminent compatriote. M. Prosper Gicquel, qui dirige ce vaste établissement, de nous avoir mis à même d’en juger l’importance et d’apprécier les services qu’en retire la Chine.

C’est parmi les représentans du règne végétal et du règne animal qu’il faut étudier un pays. Les plantes qui le nourrissent, et les animaux qu’il peut utiliser ou doit combattre, nous mettent rapidement au courant de sa vie intime. La galerie japonaise contient à cet égard des renseignemens précieux, sans être aussi instructive qu’on pourrait le souhaiter. Pourquoi n’y trouve-t-on, par exemple, ni les coquillages que l’on vend à pleins paniers dans les rues d’Yédo, ni l’infinie variété des poissons, qui tantôt cuits, tantôt crus, forment avec le riz le fond de l’alimentation ? L’attention se porte tout d’abord sur les céréales, en premier lieu le riz, dont les procédés de culture ne nous sont expliqués que par des images d’un caractère à demi comique, plus amusantes à l’œil que profitables à