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pu imaginer le quadruplex telegraph, l’électro-motographe, le relais à résistance variable, la plume électrique, le téléphone à graphite, le thermoscope, le phonographe et plusieurs appareils télégraphiques imprimeurs, s’il avait dû s’arrêter longtemps à chacune de ces conceptions.

Les productions d’Edison présentent un caractère de simplicité et d’intuition prodigieux. Toutes ses données pourraient être comprises par le premier venu. Il est inventeur d’instinct ; il a en lui le don d’imaginer au moment voulu la disposition convenable et souvent définitive. Par-dessus tout, il a la foi. Combien est grand le nombre de savans qui n’auraient même pas tenté l’expérience du phonographe ou du téléphone, convaincus d’avance que le résultat en serait négatif 1 Edison et Bell ont eu le rare mérite d’avoir confiance, et l’expérience leur a donné raison de la manière la plus éclatante.

Nous avions annoncé, il y a déjà plus de six mois[1], qu’un appareil capable d’enregistrer les sons de la voix humaine était sur le point de faire son apparition. Cette prophétie, alors presque téméraire, s’est réalisée aujourd’hui. Plusieurs esprits distingués s’occupaient à la fois de trouver une solution de ce séduisant problème. C’est à l’Amérique que revient la gloire d’avoir présenté le premier phonographe, le seul encore pour le moment. Il est difficile de concevoir un appareil plus simple que celui d’Edison.

Personne n’ignore qu’une conversation peut s’entendre au travers d’un mur suffisamment mince. C’est que ce mur vibre sous l’influence de la voix par l’intermédiaire de l’air. Ces vibrations se communiquent dans la pièce voisine jusqu’aux oreilles des personnes qui s’y trouvent, et permettent à celles-ci d’écouter la conversation tenue de l’autre côté de la paroi. Le rythme plus ou moins compliqué des ébranlemens du mur est donc tout ce qui suffit pour provoquer sur le système auditif l’impression d’une phrase prononcée. Que ces ébranlemens soient produits par la voix directe, comme cela est le cas le plus ordinaire, ou qu’ils proviennent d’organes purement mécaniques, le résultat final sera toujours le même : on entendra le même discours. Plus mince est la cloison, plus élastique est sa matière, et plus courte est la distance qui la sépare de la personne qui parle, plus aussi sera grande l’amplitude de ses déplacemens. Ou se trouve ainsi amené, pour obtenir des déplacemens maxima, à se servir d’une petite membrane de métal de très faible épaisseur. Il faudra prendre, sur une surface mobile, l’empreinte des vibrations développées par la voix, et cette empreinte

  1. Voyez la Revue du 1er janvier.