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libre Anglais ; mais le ministre d’Angleterre, sir Harry Parkes, prit sur lui de suspendre la publication, et invita le belliqueux polémiste à donner une autre carrière à son ardeur.

A part cette exception, la presse anglaise mérite généralement les mêmes éloges que celle de la métropole. Elle sait parler avec fermeté de toutes choses et se taire à propos. On ne la verra pas attaquer les représentans officiels de la Grande-Bretagne, glisser des insinuations malveillantes sur leur caractère, et, si elle discute leurs actes, ce sera toujours avec mesure et urbanité. Elle prendra volontiers sa revanche à l’égard des autres Européens, qu’elle malmène souvent sans pitié, distribuant sans trop d’égards les boutades et les leçons, notamment à son confrère français. Le cabinet d’Yédo s’inquiète plus qu’il ne veut l’avouer de cette publicité gênante, qui lui rappelle à chaque heure la place considérable qu’occupe au Japon l’élément européen et le contrôle qu’il y exerce. Telles sont les institutions à l’abri desquelles fonctionne, au Japon et en Chine, un commerce d’échange dont nous allons étudier la nature et l’activité dans chacun de ces pays.


II

Ce n’est pas sans quelque honte qu’en faisant le dénombrement des principaux articles du commerce européen avec la Chine on est obligé de donner la première place à l’opium. La consommation de cette drogue malsaine a été la cause déterminante sinon unique de la guerre de 1840 ; elle fait encore, il faut bien le dire, la préoccupation constante des consuls anglais dans leurs consciencieux rapports. Après s’être élevée en 1866 à 64,5l6 piculs, elle avait baissé en 1869 à 53,413 ; mais en 1875 elle s’est relevée à 66,461. Ces chiffres ne comprennent d’ailleurs que les quantités entrées dans les trade-ports. Quant aux quantités considérables qui passent par la douane de Canton, elles échappent à tout contrôle. L’augmentation des dernières années est d’autant plus douloureuse à constater que la production indigène du Yunnan et de l’ouest s’est accrue en même temps considérablement et que l’usage de ce toxique paraît s’être de plus en plus généralisé.

Après l’opium, qui figure aux importations pour une somme de 240 millions de francs, viennent les cotonnades et les lainages, qui atteignent ensemble 200 millions ; les métaux figurent pour 23 millions, le coton brut pour 16 millions, le riz pour 11 millions, le charbon de terre pour 6, les bois d’ébénisterie pour 7, les bois de construction pour 3. Les articles les plus demandés sont ensuite : le ginseng, le sucre, les épices, les algues marines, l’indigo, la sèche de mer, les nids d’hirondelles, les aiguilles, les allumettes,