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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 29.djvu/480

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mieux que les autres. C’est en ayant de meilleures finances, de meilleurs travaux publics, une meilleure direction commerciale, une meilleure politique étrangère que nous mériterons de prendre la place de ceux qui nous ont précédés. Je sais que cette sorte de propagande exige du temps et que les conquêtes sont lentes à venir… J’y vois un motif de satisfaction… On nous force ainsi à nous replier sur nous-mêmes, à nous observer, à nous mesurer, à acquérir ainsi les qualités qui, seules, permettent de fonder les régimes durables… » Voilà certes encore un programme qui peut n’être pas toujours d’une réalisation facile ; il est fait du moins pour tenter les esprits libéraux, pour rassurer les esprits hésitans, et ce qu’il y a de plus significaiif, c’est qu’en parlant ainsi dans des assemblées nombreuses, devant tous les représentans des intérêts de ces riches villes du nord, M. le ministre des travaux publics n’a rencontré partout qu’une sympathique et chaleureuse adhésion. Nous sommes ici un peu loin de l’atmosphère des congrès agitateurs ; nous nous retrouvons en plein courant de l’opinion et du sentiment publics, dans ce que nous appelions la vérité des choses, la vérité de la vie nationale sérieuse et pratique.

Cette propagande de l’esprit de modération et de travail que M. de Freycinet vient de faire de concert avec M. Léon Say dans les villes du nord, les collègues de M. le ministre des travaux publics et de M. le ministre des finances l’ont faite dans ces derniers temps par leurs discours à Mortagne, à Laon, à Dreux. Les uns et les autres ont saisi l’occasion d’exprimer sous des formes diverses la pensée qui les anime, qui les unit dans une même œuvre de bonne volonté, et c’est ainsi que ces voyages peuvent avoir une réelle utilité politique. Ils sont une épreuve, une sorte de session libre, un peu errante et dispersée, mais fructueuse, devançant et préparant la session parlementaire où le ministère arrivera fortifié par ces communications familières avec l’opinion. — Que les paroles ne suffisent pas, nous le savons bien ; que malgré tout il y ait des excentricités, même parfois des incidens d’administration faits pour appeler les répressions, que dans la session qui se rouvrira d’ici à quelques semaines il y ait encore des difficultés, des tiraillemens et des confusions, nous n’en doutons pas. L’optmisme trop absolument confiant ne serait certes pas un conseiller infaillible. Les luttes renaîtront assez tôt, les passions se retrouveront aux prises ; on doit tout prévoir. L’essentiel est qu’il se forme par degrés, dans le gouvernement et autour du gouvernement, un ensemble de forces modératrices suffisantes pour préserver la France des aventures nouvelles de révolution aussi bien que des aventures de réaction.

L’automne n’est pas aussi paisible pour tout le monde en Europe. On