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engagemens et qu’elle était forcée de vendre les propriétés communales, Gamala vint à son aide et lui donna d’un seul coup 3 millions de sesterces (600, 000 francs). Quelle immense fortune supposent ces libéralités ! Voilà les personnages qui habitaient les belles maisons qu’on découvre à Ostie ; on n’a pas de peine à comprendre qu’ils les aient bâties avec tant de magnificence et remplies de si beaux ouvrages.


V.

Une particularité qui frappe tous ceux qui s’occupent des antiquités d’Ostie, c’est le grand nombre de temples et de sanctuaires de toute sorte qu’on y avait construits. Les historiens et les inscriptions en mentionnent beaucoup, et quelques-uns ont été retrouvés dans les fouilles de ces derniers temps. Évidemment Ostie devait être une ville dévote. Elle possédait un culte local, celui de Vulcain, auquel elle paraît très attachée. Les pontifes de Vulcain sont chez elle les chefs de la religion : ils surveillent les autres cultes et donnent aux particuliers qui le souhaitent la permission d’élever des monumens dans les édifices sacrés. Mais Vulcain n’est pas le seul dieu qui soit fêté à Ostie, on prie aussi très dévotement les autres, surtout la Fortune et l’Espérance, véritables divinités des négocians. Castor et Pollux, protecteurs des gens de mer, Cérés, qui devait compter beaucoup d’adorateurs dans une ville enrichie par le commerce du blé. Les étrangers, qui formaient une bonne partie de la population, avaient naturellement amené leurs divinités avec eux, et elles jouissaient d’un très grand crédit. Comme les relations avec l’Égypte étaient très fréquentes, on avait élevé des autels et des statues à Isis et à Sérapis. Le culte asiatique de la Mère des dieux était aussi en grande estime, et les habitans d’Ostie avaient eu le spectacle d’un de ces sacrifices solennels qu’on appelait des Tauroboles, dans lesquels un personnage important de la ville, placé dans une sorte de cave dont le plafond était percé de trous nombreux, se faisait arroser du sang d’un taureau immolé au-dessus de lui, qui devait le purifier de ses fautes et assurer le salut de sa famille et de sa cité. Nous avons encore l’inscription destinée à conserver le souvenir de cette fête religieuse. Une des plus curieuses découvertes qu’aient amenées les dernières fouilles est celle du temple de la Mère des dieux, à côté duquel on a retrouvé la salle de réunion de la corporation religieuse des Dendrophores. Mithra, le soleil invincible, le dieu insaisissable (deus indeprehensibilis), comme l’appelle un de ses adorateurs d’Ostie, y était aussi l’objet de beaucoup d’hommages. On sait que ce culte, qui excitait la piété par ses associations secrètes et ses sacrifices mystérieux, obtint une