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Aux alentours, dans ce domaine immense qui est, pour ainsi dire, l’empire de l’Institut de Salomon, s’étendent des vergers et des jardins pour l’étude de diverses terres propres à divers genres de cultures et des différentes manières dont on peut enter les arbres et hâter la maturité des fruits. Tous les êtres vivans de la création sont réunis dans des parcs, des enclos, des piscines, en comparaison desquels nos jardins des plantes, nos ménageries, nos aquariums, même celui de l’exposition, ne sont que de véritables jouets d’enfans. Ils sont là pour servir à l’histoire naturelle, à l’anatomie, à la physiologie, pour les vivisections comme pour les dissections. Voici à ce propos un passage digne d’être remarqué : « Nous avons observé qu’il y en a qui continuent de vivre après avoir perdu quelques-unes des parties que vous appelez vitales, qu’il y en a qui morts, selon toutes les apparences, ressuscitent. » On éprouve sur eux tous les poisons et tous les remèdes ; on fabrique à volonté des géans, des nains, des monstres. Que d’expériences, que d’études, de recherches, ou même que de sciences nouvelles, anatomie comparée, physiologie expérimentale, tératologie, dont Bacon semble avoir ici le pressentiment!

Voilà déjà bien des ressources et bien des richesses scientifiques; nous n’en avons pas encore fini cependant avec l’énumération de toutes les dépendances, de tous les laboratoires, de toutes les galeries ou ateliers que comprend le collège de Salomon. Nous avons à parcourir encore des maisons spéciales pour la fabrication du vin, du cidre, des liqueurs médicinales, des cuisines pour la préparation d’alimens hygiéniques, des apothicaireries, véritables laboratoires de chimie, pour la préparation des remèdes, des fourneaux où on peut produire tous les degrés de chaleur, des cabinets ou maisons pour diverses branches de la physique, des maisons de perspective ou d’optique pour les expériences sur la lumière et les couleurs, des maisons d’acoustique pour les expériences sur les sons, d’autres encore pour les saveurs et les odeurs. Il y a aussi des maisons pour les mathématiques, fournies amplement de tous les instrumens de géométrie et d’astronomie. De là, on passe dans des musées ou des galeries où sont exposés des modèles, des machines, des chefs-d’œuvre de divers genres avec les statues des inventeurs. Parmi les expériences indiquées ici par Bacon, signalons l’imitation du vol des oiseaux dans l’air et la construction de bateaux qui vont sous l’eau.

N’oublions pas les plus curieuses de ces maisons, celles pour les prestiges, qui sont pour ainsi dire des laboratoires de miracles. On cherche en effet à y reproduire des choses merveilleuses, des apparences de miracles, c’est-à-dire toutes les illusions qui peuvent tromper les hommes et faire croire à des miracles. «Vous vous persuaderez facilement, dit le membre du