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Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 29.djvu/692

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par aucune autorité, cherchent et chercheront toujours. Le comte de Marsigli voulut encore orner de ce côté-là sa patrie déjà si ornée. » Il fit, en 1712, une donation au sénat de la ville du fonds extraordinairement riche qu’il possédait, de pièces pour l’histoire naturelle, d’instrumens d’astronomie et de physique, de plans pour les fortifications, de machines, d’antiquités, d’armes étrangères, de modèles, acquis à grands frais et transportés, avec des frais non moins considérables, de différens lieux éloignés jusqu’à Bologne. En même temps il fondait un corps qui en eut la garde et qui les fit servir à l’avantage du public. « Il nomma ce corps l’Institut des arts et des sciences de Bologne. Le nouvel Institut fut subordonné à l’université et relié aux deux autres académies. En lisant la curieuse introduction de la première série des Mémoires de l’Institut de Bologne où est racontée en détail l’histoire de sa fondation, où sont énumérées ses diverses attributions et ses richesses, où sont décrites les diverses parties du magnifique local qu’il occupe, on croirait lire encore la Nouvelle Atlantide. Mais ici ce n’est plus un roman, c’est une réalité.

Voici en effet la description que donnent Fontenelle et l’auteur de cette introduction du palais construit pour recevoir les collections du comte de Marsigli. Ce palais fut divisé en diverses parties ou quartiers consacrés à telle ou telle science ; chaque professeur habite dans le quartier de la science qu’il enseigne, comme au centre de son empire. En suivant la description de la préface des mémoires, on se promène dans les diverses parties occupées par telle ou telle science; des salles consacrées à l’astronomie et à l’art militaire, on passe à celles de la physique, puis aux antiquités. La bibliothèque est au centre; vient ensuite l’histoire naturelle qui a quatre grandes salles. Enfin on ne tarda pas à y élever aussi une tour pour les observations astronomiques. « On croit voir, dit Fontenelle, l’Atlantide de Bacon exécutée, le songe d’un savant réalisé. Il sera facile de juger qu’on n’a pas oublié un observatoire. » L’astronomie était en effet fort à la mode au XVIIIe siècle, et il n’y avait pas d’académie, même d’académie de province, qui n’eût ou ne voulût avoir son observatoire.

L’Institut de Bologne, ouvert en 1714, s’accrut successivement par l’adjonction des académies de peinture, de sculpture, d’architecture, et enfin de l’académie des sciences elle-même. Pour rendre plus complète la ressemblance de son Institut avec l’Institut de Salomon, ajoutons que le comte de Marsigli avait voulu, comme Bacon, rehausser son académie aux yeux du peuple par un appareil religieux. « Nous passons sous silence, dit un peu malicieusement Fontenelle, des processions où il voulait qu’on portât huit bannières qui auraient présenté les principaux événemens de la vie de