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ou de la science. Elle devrait même renoncer à continuer ses comptes-rendus et ses publications, dont l’intérêt est si grand pour le monde savant tout entier, mais dont les frais vont en croissant, si elle n’avait réussi, non sans quelque peine, à se faire accorder deux secours, l’un de 10,000, l’autre de 15,000 francs, en 1877 et en 1878. Mais elle n’a pu encore obtenir une augmentation fixe, quoique cette augmentation soit indispensable pour la continuation de ses travaux[1].

Nous insistons sur cette pénurie des ressources de l’Académie des sciences, sur l’impuissance où elle est de faire par elle-même ce qui importerait le plus pour la vérification de telle ou telle loi, pour telle ou telle découverte, parce que cette pénurie et cette impuissance, disons le mot, cette détresse, est plus sensiblement préjudiciable au progrès non-seulement des grandes vérités scientifiques, mais des applications les plus utiles. Si les autres classes de l’Institut, à cause de la nature de leurs travaux, ne paraissent pas aussi dénuées, elles sont loin d’avoir, elles aussi, tout ce dont elles auraient besoin pour les recherches, les encouragemens et les récompenses, pour les missions qui sont de leur domaine et pour leurs diverses publications, plus ou moins en retard et languissantes faute de fonds. D’après quelques comparaisons que nous avons pu faire, nous avons tout lieu de penser qu’au point de vue de tous les moyens d’action dans la sphère des sciences et dans celle des lettres, l’Institut de France est plus pauvrement doté, non-seulement que la Société de Londres, mais que la plupart des grandes académies de l’Europe. Ses ressources sont moindres, toutes proportions gardées, qu’au XVIIIe siècle. Non-seulement l’argent lui manque, mais aussi la place pour faire une expérience ou même pour loger une machine de quelque volume. Les quelques instrumens que l’Académie des sciences possédait autrefois ont dû être en grande partie transportés au Conservatoire des arts et métiers. Un des membres de l’Académie des sciences avait eu jusqu’à présent le titre de conservateur des machines. A la mort de M. Becquerel, qui l’a porté le dernier, l’Académie n’a pas jugé, croyons-nous, devoir faire passer à un autre ce titre « impropre et fastueux, » pour me servir des expressions que Fontenelle applique à celui de trésorier qu’avait un de ses membres au XVIIIe siècle.

Pourquoi donc l’Institut de France ne se ressentirait-il pas davantage de la faveur universelle qui s’attache aujourd’hui au progrès des lumières? N’est-ce donc pas jusqu’à lui qu’il faut remonter pour en trouver la source première comme aussi le plus puissant encouragement? Rien sans doute de plus louable que les sacrifices

  1. Nous devons dire, à l’honneur de M. Bardoux, qu’une augmentation fixe de 15,000 francs est enfin portée au budget de 1878.