arrêter la violence des eaux. Partout où les forêts ont disparu, même lorsqu’elles ont été remplacées par des gazons ou des broussailles, le régime des rivières est devenu irrégulier, et des torrens se sont formés. Le mal était devenu tel que les départemens exposés à ces ravages se dépeuplaient et que des communes entières étaient abandonnées. Sous peine de voir une partie de la France se transformer en désert, il fallut chercher un remède à la situation.
Un projet de loi sur le reboisement fut en conséquence élaboré par M. de Forcade La Roquette, directeur général des forêts, et voté en 1860 par le corps législatif. D’après les dispositions de cette loi, complétée plus tard par une loi sur le regazonnement, les travaux de reboisement sont divisés en travaux facultatifs et en travaux obligatoires. Les premiers sont ceux que les propriétaires, communes ou particuliers, exécutent bénévolement, et pour lesquels ils reçoivent des primes, soit en argent, soit en nature, par la délivrance de graines et de plants ; les travaux obligatoires au contraire sont prescrits par un décret du président de la république à la suite de la reconnaissance faite par les agens forestiers du périmètre des terrains à reboiser. Lorsque ces terrains appartiennent à l’état, l’opération ne souffre aucune autre difficulté que celle de l’exécution ; mais si, dans l’intérieur de ces périmètres, il se trouve des terrains appartenant aux communes ou aux particuliers, l’administration forestière est autorisée à s’en emparer par voie d’expropriation publique, à exécuter les travaux directement, sauf à se rembourser de ses frais en conservant une partie des terrains ainsi reboisés. Quels ont été les résultats de ces lois depuis leur promulgation, et les millions dépensés ont-ils porté leurs fruits ? C’est ce qu’il reste à examiner.
L’exécution matérielle des travaux a laissé peu à désirer, et partout où ils ont été entrepris, ils ont atteint le but qu’on avait en vue. Les premières années ont été employées par l’administration forestière à créer des pépinières et à organiser le service. Après quelques tâtonnemens inévitables, on a reconnu qu’avant d’entreprendre le reboisement proprement dit des terrains exposés aux ravages des torrens, il fallait empêcher les ravinemens et les affouillemens. On est arrivé à ce résultat au moyen de clayonnages et de barrages en pierre qui, placés en travers du torrent, en arrêtent à chaque instant le cours et en diminuent la violence. Une fois consolidé par les atterrissemens, le sol est livré à la culture forestière, qui de son côté empêche l’écoulement trop rapide des eaux, en facilite l’infiltration et en régularise le régime. Partout où ces travaux ont été exécutés, ainsi d’ailleurs que le montrent les photographies de M. de Gaffiyer et les plans en relief envoyés à l’exposition, les terres ont été maintenues, une végétation